http://www.lapresse.ca/le-droit/chroniqueurs/denis-gratton/
Publié le 03 février 2017 à 23h00 | Mis à jour le 03 février 2017 à 23h00
Publié le 03 février 2017 à 23h00 | Mis à jour le 03 février 2017 à 23h00
DENIS GRATTON
Le Droit
Le Droit
CHRONIQUE - GRANDE ENTREVUE / Plus de cinq mois se sont écoulés depuis le départ de Mauril Bélanger. Diagnostiqué avec la sclérose latérale amyotrophique (SLA) en novembre 2015, l'ancien député fédéral d'Ottawa-Vanier a rendu l'âme neuf mois plus tard, à l'âge de 61 ans, après une courte mais courageuse lutte contre une maladie agressive et impitoyable.
« Son courage était incroyable, confie son épouse, Catherine Bélanger. Et Mauril n'a mentionné qu'une fois qu'il était atteint de la SLA. Qu'une seule fois, soit au tout début de la maladie. Après, il a décidé de ne plus en parler et de continuer. De continuer de lutter afin de trouver un remède à cette terrible maladie. Et de continuer de travailler à la Chambre des communes. Tout le monde qui le voyait disait : 'c'est pas possible'. Mais c'était Mauril ! Il a été incroyable à travers tout ça. Sa grâce, sa dignité, sa détermination... il a été incroyable. Et j'étais tellement fière de lui. »
Catherine Bélanger est toujours ébranlée par le départ de son mari, le député fédéral Mauril Bélanger, avec qui elle a partagé 36 ans de vie. « Mais Mauril sera toujours avec nous », dit-elle en souriant. PATRICK WOODBURY, LE DROIT |
Catherine Bélanger a pris la relève de son époux dans la lutte contre la SLA et elle est très engagée auprès du Fonds communautaire Mauril Bélanger, Retraitée de la fonction publique fédérale où elle a oeuvré pendant une trentaine d'années, elle a aussi repris le travail, consacrant une vingtaine d'heures par semaine comme adjointe au sénateur Peter Harder. Mais elle avoue être toujours un peu secouée par le départ si soudain de celui avec qui elle partageait sa vie depuis 36 ans.
« Je vis un jour à la fois, laisse-t-elle tomber. Mauril et moi pensions que nous avions plusieurs années devant nous. Donc je suis toujours un peu sous le choc. Mais j'étais déjà à la retraite quand la SLA s'est manifestée. Donc en ce sens, c'était bien parce que j'ai pu rester auprès de lui dès le début de la maladie. Et j'ai pu profiter de ce temps avec lui. J'étais prête pour l'aider. Mais que la maladie progresse si vite, ça, ce n'était pas prévu. Mauril avait eu une trachéotomie (ouverture chirurgicale de la trachée). Et on pensait qu'il aurait pu vivre plus longtemps après cette chirurgie. Plusieurs personnes atteintes de la SLA vivent plus lontemps après une trachéotomie. Mais ce ne fut pas le cas pour nous. »
Mauril Bélanger est décédé le 16 août 2016. Chez lui. Auprès de Catherine.
« C'est comme ça qu'on le voulait, affirme-t-elle. J'ai été son infirmière pendant plusieurs semaines. J'ai passé deux semaines à l'Hôpital Montfort pour apprendre comment prendre soin de lui à la maison et comment nettoyer la trachéotomie. Les infirmières m'observaient, j'ai appris toutes les routines. C'est moi qui lui donnais ses médicaments et ses injections. L'hôpital voulait s'assurer que j'étais capable. Mais après six semaines à la maison, je suis devenue un peu fatiguée et j'ai obtenu de l'aide, des soins à domicile. Mais quand ça devenait un peu trop compliqué, les infirmières venaient me chercher pour aider (rires). Je connaissais toutes les interventions nécessaires.
«On communiquait bien au niveau des yeux et des émotions, Mauril et moi. Mais pas des mots, parce que Mauril ne pouvait plus parler en dernier. Mais nous étions ensemble depuis 36 ans. Et parfois, on n'a pas besoin de mots. Mais je me souviens que Mauril, à l'occasion, se regardait devant le miroir. J'aurais aimé savoir exactement à quoi il pensait en ces moments-là. Mais aujourd'hui, et depuis son départ, nous continuons la conversation, lui et moi. Son esprit sera toujours avec nous. Il est partout, il est autour, et ça me fait du bien.
- Et comment souhaiteriez-vous que les gens se souviennent de lui ?
«J'aimerais qu'on se souvienne de son sourire, répond-elle. Et de l'étincelle dans ses yeux. J'adorais cette étincelle qu'il avait dans ses yeux. Mauril était un homme généreux, très humain, honnête, intègre, déterminé, juste, respectueux. Et de l'étudiant révolutionnaire qu'il était à l'université (d'Ottawa) et que j'ai rencontré il y a 36 ans, Mauril est devenu un homme d'État. Il était fier de son cheminement. Et moi aussi.»
La course à l'investiture libérale dans Ottawa-Vanier se terminera dimanche alors qu'on choisira un successeur à Mauril Bélanger. Plusieurs croyaient que Catherine Bélanger allait être de cette course pour prendre la relève de son regretté mari. Certains lui prédisaient même une victoire assurée si elle plongeait. Mais elle a dit non.
«C'était trop tôt, explique-t-elle. Il y a des gens qui ont commencé à m'en parler après les funérailles. Quelqu'un m'en a même parlé avant les funérailles, soupire-t-elle en levant les yeux au ciel. Mais ce n'était pas le temps. Et Mauril a été en politique pendant une trentaine d'années. C'était toujours la politique, la politique, la politique. Nos horaires étaient toujours réglés par la politique. Mais là, je veux profiter de ma retraite, m'occuper de ma famille et peut-être voyager un peu. On verra. Oui, je veux m'impliquer, mais il y a d'autres façons que je peux aider.
«Je pense qu'on a besoin de quelqu'un de nouveau dans Ottawa-Vanier et quelqu'un qui a plus d'énergie. Mais quelqu'un qui saura poursuivre l'héritage de Mauril. Et ses valeurs sont son héritage. Mauril était un homme de valeurs.»