Manifestation de la Fédération interprofessionnelle de la santé à Québec, le 2 octobre dernier
Les membres de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) seront appelés, le 20 octobre, à approuver le recours à la grève.
Le mandat, qui sera ouvert et d’ordre général, portera sur le déclenchement de grèves rotatives, a-t-on indiqué à la FIQ. L’exécutif syndical pourra décider de la durée et de la fréquence des grèves et si elles sont déployées aux échelles locale, régionale ou nationale.
La FIQ soutient que son objectif n’est pas de perturber les services à la population. De toute façon, l’exigence du maintien des services essentiels fait en sorte que 90 % du personnel infirmier ne peut débrayer, a-t-on rappelé. La FIQ représente 66 000 infirmières et autres professionnels de la santé. «Ce qui est important pour nous, c’est de ne pas prendre les patients en otage», a affirmé au Devoir un porte-parole.
Il y a 10 jours, la FIQ revenait à la table sectorielle des négociations après l’avoir abandonnée pendant un peu plus d’une semaine. Le gouvernement a présenté une nouvelle offre. Dans cette mouture, il a retiré quelques-unes de ses demandes jugées inacceptables par la partie syndicale. Il renonce à vouloir abolir les primes majorées consenties aux infirmières qui travaillent fréquemment les soirs et la nuit ou aux soins critiques. L’importance pécuniaire de ces primes est non négligeable : quelque 100 millions de dollars. En outre, une exigence qui augmentait la précarité des infirmières auxiliaires a également été biffée.
Moyens de pression
Le gouvernement a donc bougé au cours des derniers jours, mais les parties sont encore très loin d’une entente, estime-t-on à la FIQ. L’enjeu des horaires de travail, important aux yeux des infirmières, n’a pas été abordé. Les gestionnaires des établissements favorisent les horaires à temps partiel, plus pratiques pour eux. Les deux tiers des infirmières auxiliaires travaillent à temps partiel et sur appel, tandis que la moitié des infirmières cliniciennes sont soumises à ce même régime. Fixer des ratios infirmières-patients fait également partie des demandes de la FIQ.
Outre les grèves rotatives — le Front commun a aussi annoncé le déclenchement de grèves tournantes à la fin du mois —, la FIQ entend utiliser des moyens de pression destinés à enquiquiner les patrons, comme de cesser de colliger les statistiques ou déroger au code vestimentaire.
La FIQ a également lancé une campagne de publicité dont le slogan est : «Négocier pour mieux vous soigner» qui paraîtra dans Le Devoir, Le Journal de Montréal et Le Journal de Québec ainsi que dans plusieurs quotidiens régionaux.
La présidente de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec, Régine Laurent
La moitié des infirmières de 50 ans et plus songent à raccrocher leur stéthoscope d’ici trois ans si Québec persiste avec son intention de modifier leur régime de retraite. Ce scénario d’«exode» fait craindre le pire aux organisations syndicales et aux gestionnaires du milieu de la santé, qui se remémorent les quelque 4000 infirmières ayant quitté le réseau en 1997, et qui ont laissé derrière elles une pénurie qui se fait encore sentir.
Selon un coup de sonde mené pour le compte de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), 7500 infirmières «menacent» de partir à la retraite d’ici trois ans, soit la période où les changements au fonds de pension entreraient en vigueur. La FIQ a dévoilé ces résultats dimanche, alors que les négociations sont en cours avec le Conseil du trésor pour le renouvellement de la convention collective des 65 000 membres de l’organisme, qui représente plus de 80 % du corps infirmier québécois.
«Ce que nous présentons ce n’est pas de la frime. […] Il y a une réelle volonté des infirmières de quitter. Et si le gouvernement s’obstine, il va rendre le réseau de la santé encore plus malade et mettre en péril la qualité et la sécurité des soins aux patients», a déclaré Régine Laurent, présidente de la FIQ. Chiffres à l’appui, elle fait valoir que la moitié des 600 infirmières sondées veulent partir en retraite d’ici trois ans à cause des concessions exigées par Québec. Trois critères font particulièrement grincer des dents les professionnelles : repousser l’âge de la retraite de 60 à 62 ans, augmenter la pénalité applicable pour une retraite anticipée et réviser le calcul de prestation en se basant sur la moyenne des huit meilleures années, et non des cinq.
Selon les calculs de la FIQ, les changements souhaités par le gouvernement Couillard se traduiraient par de lourdes pertes de revenus de retraite. Par exemple, dans le cas d’une infirmière de 58 ans détenant 31 années de service, la perte s’élèverait à 9500 $ par année. Les infirmières sondées sont déjà bien conscientes des «risques d’appauvrissement», affirme Mme Laurent, puisque les deux tiers de celles ayant exprimé le désir de partir ont affirmé avoir entrepris des démarches auprès de la Commission administrative des régimes de retraite et d’assurances pour devancer leur départ et éviter les pénalités.
Le président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, n’a pas voulu commenter les résultats du sondage.
Une répétition de 1997
Le vice-président de la FIQ, Daniel Gilbert, craint de voir se concrétiser le départ de quelque 7500 infirmières au cours des trois prochaines années. À son avis, la situation serait «pire»qu’en 1997, quand le gouvernement de Lucien Bouchard avait mis sur pied un programme de départs volontaires à la retraite au sein de la fonction publique. «Le réseau sent encore les impacts de cette pénurie [...]», soupire-t-il, ajoutant que depuis ce temps, le recours aux heures supplémentaires est devenu systématique.
Du côté des gestionnaires des réseaux de la santé, les craintes sont grandes. «Ça va devenir un casse-tête infernal pour offrir les soins, la qualité du réseau est plus que mise à mal, elle est menacée», lance Diane Lavallée, directrice de l’Association québécoise d’établissements de santé et de services sociaux (AQESSS), association patronale qui a dû se saborder, faute de financement. L’organisme mettra la clé sous la porte le 31 mai prochain. Mme Lavallée n’est pas seulement inquiète de l’avenir des gestionnaires, mais aussi des infirmières qui resteront en poste. «Déjà, on observe de nombreux congés de maladie pour cause de surmenage et d’excès de stress… Qu’est-ce que ce sera dans trois ans?»
Il faut prendre les chiffres de la FIQ avec «un grain de sel», croit pour sa part Pierre Blain, directeur général du Regroupement provincial des comités des usagers (RPCU). «Ils sont en négociation, c’est de bonne guerre de brandir des chiffres qui font peur», ajoute-t-il, évaluant que la situation est bien différente de celle de 1997, où on offrait des indemnités de départ. M. Blain estime que les deux parties doivent trouver le moyen de s’entendre. Il propose l’inclusion d’une clause de droits acquis, qui permettrait aux infirmières en fin de carrière d’éviter les nouvelles pénalités. «Il faut être prudent, car ce genre de décision pourrait aussi décourager la relève», dit-il.
Les départs à la retraite influencés par les mesures proposées
61% des infirmières se sont dites influencées par la mesure faisant passer l’âge de la retraite de 60 à 62 ans à compter de 2017.
71% craignent de voir Québec augmenter la pénalité pour une retraite anticipée de 4 à 7,2% par année.
64% expliquent leur décision par la volonté gouvernementale de changer le calcul de la prestation, qui se baserait sur la moyenne salariale des huit dernières années plutôt que des cinq.
Le sondage possède une marge d’erreur maximale de plus ou moins quatre points de pourcentage.
Le syndicat qui représente les infirmières au Québec prédit une « catastrophe » pour le réseau de la santé si le gouvernement libéral persiste avec son intention de modifier le régime de retraite des employés de l'État.
Selon un sondage réalisé pour le compte de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), près de la moitié de ses membres de plus de 50 ans ont l'intention de prendre leur retraite d'ici trois ans.
« Ça représenterait des départs massifs de 7500 infirmières en pleine période de pénurie d'infirmières auxiliaires, d'inhalothérapeutes et de perfusionnistes », déplore la présidente de la FIQ, Régine Laurent.
C'est davantage qu'en 1997, alors que 6000 infirmières avaient pris leur retraite à la suite des réformes du gouvernement péquiste de Lucien Bouchard, prévient Mme Laurent. Selon elle, ces départs avaient créé des « torts au réseau de la santé dont on subit encore les effets ».
La majorité des professionnelles en soins interrogées ont indiqué que leur intention de partir était motivée par les récentes mesures proposées par le gouvernement.
61 % se sont dites influencées par la mesure faisant passer l'âge de la retraite de 60 à 62 ans à compter de 2017;
71 % motivent leur décision par la volonté de Québec d'augmenter la pénalité pour une retraite anticipée de 4 à 7,2 % par année;
64 % expliquent être influencés par le changement dans la façon dont la rente est calculée, en tenant compte du salaire moyen des huit dernières années plutôt que des cinq, comme c'est le cas présentement.
« Martin Coiteux va rendre le réseau de la santé encore plus malade et mettre en péril la qualité et la sécurité des soins aux patients s'il persiste. »
— Régine Laurent, présidente de la FIQ
Le ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, ne commentera par l'enquête de la FIQ pour le moment.
Méthodologie
Le sondage téléphonique a été réalisé auprès de 602 membres de la FIQ de 50 et 64 ans, du 27 au 30 mars 2015, par la firme Repères. Les données ont été pondérées selon le titre d'emploi, l'âge, le statut et les régions. La marge d'erreur est de plus ou moins 4 %.