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Guy Turcotte aurait bu du lave-glace moins d'une heure avant de se faire arrêter par la police, a témoigné à son procès un toxicologiste médical qui a expliqué que dans la majorité des cas, cette substance n'a pas d'effet sur le cerveau - et lorsqu'il y en a, ils sont très légers.
Voilà certaines des conclusions du docteur Martin Laliberté, déclaré par le tribunal expert en médecine d'urgence et en toxicologie médicale.
L'homme exerce la médecine à temps plein et est consultant au centre anti-poison et au bureau du coroner.
Guy Turcotte est accusé du meurtre prémédité de ses deux enfants, Olivier, cinq ans, et Anne-Sophie, trois ans. Il présente une défense de non-responsabilité criminelle pour cause de troubles mentaux.
L'accusé a témoigné avoir voulu se suicider le soir du 20 février 2009 et avoir bu du lave-glace dans ce but. Se "voyant" mourir, il a soudainement décidé de tuer ses enfants pour leur épargner la souffrance de retrouver son cadavre le lendemain, a-t-il ajouté. Il dit ne pas tout se rappeler de ce qui s'est passé ce soir-là.
De plus, selon les experts de la défense _ les docteurs Louis Morissette et Dominique Bourget _ le jugement de Guy Turcotte le soir du 20 février 2009 était perturbé et altéré, principalement en raison de la maladie mentale dont il souffrait.
Mais la docteure Bourget avait indiqué dans un premier rapport écrit en 2011 qu'"il est clair que l'intoxication au méthanol est susceptible de causer une perturbation du jugement et une altération de la conscience". Dans un second rapport de 2015, la question du méthanol avait presque entièrement été évacuée.
Mercredi, le docteur Laliberté a expliqué que le méthanol, contenu dans le lave-glace, n'est pas toxique en soi. Il le devient quand le corps le transforme en acide.
Les effets toxiques du méthanol peu de temps après l'ingestion, sont des nausées, des vomissements et des crampes abdominales. "C'est à peu près tout initialement", a dit le docteur Laliberté.
Après l'absorption, cela prend de 12 à 24 heures avant que le méthanol ne devienne un acide toxique. À ce moment, la personne affectée peut avoir une respiration difficile, devient comateuse, somnolente, et a une vision trouble. Éventuellement, sans traitement, elle peut en mourir.
"Le méthanol dans la majorité des cas n'a pas d'effets sur le cerveau. S'il y a des effets, ils sont très légers", a expliqué le docteur au jury de 11 personnes.
Dans son rapport, il écrit: "Dans la majorité des cas, le méthanol ne causera initialement aucun effet significatif au niveau de l'état de conscience même avec des concentrations sanguines plusieurs fois supérieures à celles nécessitant un traitement en milieu hospitalier."
Il a cité un cas d'un patient, qui avait dans son sang 692 mg par 100 ml de sang - plus du double du taux de Guy Turcotte. Il n'avait pas de problème de conscience, que de petites difficultés d'allocution.
L'expert a ensuite fait des calculs pour comparer le taux de méthanol qu'avait Guy Turcotte lorsqu'il a été hospitalisé au lendemain des meurtres.
Son taux était de 356 mg de méthanol dans 100 ml de sang à 12h27 et de 395 mg à 14h42. Parce que le taux a augmenté avec le passage du temps _ au lieu de diminuer _ cela fait dire à l'expert que l'accusé avait encore du méthanol non absorbé dans son tube digestif
à son arrivée à l'urgence. Et qu'il a été absorbé peu après, faisant grimper son taux.
Le méthanol prend de 30 à 90 minutes à être absorbé par le tube digestif, dit-il.
Donc, il a bu du méthanol au maximum 90 minutes avant, vers 11h du matin, a tranché l'expert.
Guy Turcotte a été placé en état d'arrestation à 11h41.
La Couronne a entamé sa contre-preuve mardi, visant à répliquer aux experts de la défense sur l'état mental de l'accusé.
Son dernier témoin était le docteur Laliberté, qui sera contre-interrogé jeudi matin.
Après cette étape, les plaidoiries des avocats pourront commencer, possiblement lundi matin.