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La juge France Charbonneau Photo : PC/Graham Hughes |
Plus de quatre ans après sa création, et après deux longues prolongations de son mandat, la Commission d'enquête sur l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction présidée par la juge France Charbonneau s'apprête finalement à publier son rapport.
Selon nos informations, la commission a l'intention de présenter ses conclusions la semaine prochaine, bien que la date précise ne soit pas encore arrêtée.
Le document, assurément volumineux, contiendra une série de recommandations pour combattre les stratagèmes de collusion et de corruption mis au jour grâce au témoignage de près de plus de 250 témoins entendus. Quelque 150 mémoires lui ont été soumis à cette fin.
Les Québécois pourront alors prendre connaissance des conclusions de la commission quant à la gestion des contrats accordés par les pouvoirs publics, le financement des partis politiques provinciaux et municipaux et l'infiltration de l'industrie de la construction par la mafia et les Hells Angels.
La commission Charbonneau a été mise sur pied par le gouvernement libéral de Jean Charest le 19 octobre 2011, 927 jours après avoir été réclamée une première fois à l'Assemblée nationale par la députée adéquiste Sylvie Roy dans la foulée de révélations faites par l'émission Enquête de Radio-Canada et le quotidien La Presse.
Le premier ministre Jean Charest, qui avait longtemps résisté aux nombreux appels en faveur de cette commission, disait avoir été convaincu par les « constats troublants » mis au jour dans lerapport du directeur de l'Unité anticollusion (UAC), Jacques Duchesneau, faisant étant de pratiques douteuses, voire illégales, à Transports Québec.
La commission n'a pas été assujettie d'emblée à la Loi sur les commissions d'enquête. Devant le tollé soulevé par cette décision, le gouvernement a fait volte-face trois semaines plus tard; France Charbonneau a alors obtenu le pouvoir d'assigner des témoins à comparaître et ces derniers ont pu bénéficier d'une immunité relative.
Les travaux de la commission d'enquête ont été officiellement lancés par une allocution de France Charbonneau le 21 février 2012, mais ils ont véritablement pris leur envol avec le volet des témoignages, le 8 juin 2012. Jacques Duchesneau a entrepris son long témoignage cinq jours plus tard.
L'enquête publique a cependant pris les dimensions d'une affaire d'État lorsque l'ex-entrepreneur Lino Zambito a été convoqué à la barre des témoins l'automne suivant. Suivant les travaux en direct à la télévision ou sur les médias sociaux, les citoyens ont alors commencé à prendre la mesure de la gangrène qui rongeait certaines de leurs institutions.
Cette portion des travaux consacrée à la collusion et à la corruption à la Ville de Montréal a cependant été marquée par de premières difficultés pour la commission, qui a dû encaisser les départs successifs de son procureur en chef, Sylvain Lussier, et de son adjoint Claude Chartrand.
M. Lussier a été remplacé par Sonia Lebel, tandis que Denis Gallant a pris la place de M. Chartrand, mais les travaux ont néanmoins été suspendus hâtivement en novembre 2012. M. Gallant quittera lui aussi son poste en février pour devenir inspecteur général de Montréal.
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La commission a rapidement réalisé qu'elle n'arriverait pas à livrer son rapport pour le 19 octobre 2013, comme cela lui avait été demandé au départ. Le gouvernement Marois a accepté de prolonger son mandat de 18 mois, soit jusqu'au 19 avril 2015.
Les travaux de la commission ont aussi été suspendus pendant quelques semaines en mars et en avril 2014, en raison de la campagne électorale au Québec, ce qui n'a pas manqué de soulever la controverse. « Nous ne voulons pas risquer que [les] audiences soient entraînées dans l'arène politique », avait-elle fait valoir.
La commission a néanmoins demandé une seconde prolongation de son mandat de sept mois en janvier 2015, quelques semaines après avoir terminé ses audiences publiques. Le gouvernement Couillard a accepté cette requête.
Les travaux de la commission Charbonneau avaient coûté près de 36 millions au Trésor public en date du 31 octobre 2014. La facture finale dépassera donc sans doute les 40 millions de dollars.
Le mandat de la commission, portant sur la période 1996-2011 :
- examiner l'existence de stratagèmes et, le cas échéant, dresser un portrait de ceux qui impliqueraient de possibles activités de collusion et de corruption dans l'octroi et la gestion de contrats publics dans l'industrie de la construction, y compris des liens possibles avec le financement des partis politiques;
- dresser un portrait de possibles activités d'infiltration de l'industrie de la construction par le crime organisé;
- examiner des pistes de solution et faire des recommandations en vue d'établir des mesures permettant de repérer, d'enrayer et de prévenir la collusion et la corruption dans l'octroi et la gestion des contrats publics dans l'industrie de la construction ainsi que l'infiltration de celle-ci par le crime organisé.