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jeudi, avril 02, 2015

Lettre aux jeunes dans la rue

http://www.journaldequebec.com/

Bloc austérité
PHOTO COURTOISIE
Mario Dumont
Vous serez des milliers à prendre la rue jeudi pour exprimer votre colère contre le gouvernement Couillard.
Que la jeunesse questionne l’ordre établi, cela va de soi, c’est même le signe d’une société en santé. Par contre, je m’explique mal comment le débat politique et économique a pu virer pour que la jeunesse d’une société ait l’air de se foutre qu’on continue à l’endetter.
À l’époque où j’étais militant (bon, ça fait un quart de siècle), beaucoup de jeunes contestaient en réclamant une plus grande équité entre les générations. Le marché du travail était fermé pour les jeunes. Les cotisations insuffisantes à la régie des rentes amenaient à croire que la caisse serait vide lorsque ma génération arriverait à la retraite.
De toutes les revendications qu’on ait pu faire en matière d’équité entre les générations, la plus significative demeure l’arrêt de l’endettement. Emprunter, c’est reporter le paiement d’une dépense. Dans le cycle de vie d’une famille, on emprunte quand on fonde une famille, par exemple pour l’achat d’une maison, et on rembourse ensuite. À moins de difficultés majeures, personne ne souhaite laisser à sa descendance un héritage de dettes.
Payer plus tard
Dans le cas d’un gouvernement, emprunter c’est carrément reporter la dépense sur les futurs payeurs d’impôt. Vous payez à crédit un salaire de fonctionnaire pour offrir un service public cette année, et quelqu’un qui est un enfant aujourd’hui remboursera quand il sera rendu sur le marché du travail plus tard. Pourquoi? En vertu de quel principe?
Il s’agit d’une injustice flagrante envers les futures générations. Vous, les jeunes qui marcheront jeudi, devriez inscrire cela sur vos pancartes. Mais en dénonçant l’austérité, l’impression donnée, c’est que vous demandez au gouvernement d’emprunter davantage.
Probablement que la dette, on en parle depuis trop longtemps, c’est devenu plate. Les gouvernements nous ont tellement dit qu’ils s’en occupaient, qu’il fallait se serrer la ceinture, qu’on n’entend plus. Et pourtant...
Toujours en hausse
Quand j’étais jeune militant et que je réclamais qu’on ne nous transfère pas ce fardeau sur la tête, la dette était de moins de 40 milliards et représentait 25 % du poids de l’économie. Aujourd’hui, la dette du gouvernement dépasse les 197 milliards et son poids dans l’économie a doublé.
Vous pensez que l’austérité va faire diminuer la dette? Attention. L’élimination du déficit n’empêchera pas le gouvernement d’emprunter pour les travaux d’infrastructures par exemple. Dans le budget Leitao, on prévoit donc que la dette du Québec passera de 197 milliards (l’an dernier) à 206 milliards cette année, 210 milliards l’an prochain, puis 214, 216 et jusqu’à 220 milliards en 2020. En y ajoutant les réseaux et les sociétés d’État, la dette totale du gouvernement du Québec dépassera probablement les 300 milliards en 2020!
On peut avoir 20 ans et trouver que ce sujet de la dette, c’est pas chill, c’est pascool, c’est full poche. Mais en marchant, vous ne pouvez pas faire abstraction que ce poids pèse sur vos têtes.