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mardi, mai 12, 2015

L’alliance pragmatique

http://www.journaldequebec.com/

Mario Dumont
Le premier ministre du Québec s’est adressé hier à l’Assemblée législative ontarienne. L’entourage de Philippe Couillard a tenté de jouer l’affaire comme un moment de prestige. Philippe Couillard est le premier chef du gouvernement québécois depuis Jean Lesage à se présenter à cette tribune.
Soyons sérieux. Ce n’est pas comme si les prédécesseurs de M. Couillard avaient subi une rebuffade après avoir quémandé de prendre la parole devant les parlementaires ontariens. Plusieurs ne se sont sans doute même jamais posé la question, n’y voyant pas le moindre intérêt.
Qu’aurait fait Bourassa ?
J’oserais avancer qu’un Robert Bourassa aurait refusé même si on lui avait offert la tribune, sentant que cela faisait un peu provincialisme. Il préférait jouer la carte nationaliste qui défend bec et ongles les intérêts du Québec dans le Canada plutôt que la carte des amitiés et politesses entre provinces.
Philippe Couillard a fait une très honorable prestation dans un honorable forum, mais les Québécois ne sont pas éberlués par le caractère prestigieux de l’événement. Notre premier ministre n’a pas pris la parole au Capitole des États-Unis ni à l’Assemblée nationale française. Restons calmes.
Cela ne veut pas dire que cette journée ne fut pas importante et positive. Ce n’est pas du côté du prestige qu’il faut analyser cette action. Il faut surtout y voir la consolidation d’une alliance politique qui est loin d’être insignifiante entre le premier ministre du Québec et son homologue ontarienne.
Canada central
Le Québec et l’Ontario, c’est le Cana­da central. Pendant des décennies, le Canada central a mené le jeu au Cana­da. Le premier ministre du Canada et ses principaux lieutenants provenaient de l’Ontario et du Québec. L’Ouest et les Maritimes étaient aussi représentés dans les gouvernements, mais traités en quelque sorte comme des régions périphériques dont le pouvoir central tenait compte.
Les choses ont changé depuis une décen­nie. L’argent s’est déplacé vers l’ouest. Le pouvoir politique aussi, notamment avec l’arrivée de Stephen Harper. Il ne s’agit pas de dire que le gouvernement Harper maltraite tout ce qui n’est pas dans l’Ouest canadien. Mais il faut quand même constater que l’axe Ontario-Québec a perdu de l’influence.
C’est donc dans ce contexte que Kathleen Wynne et Philippe Couillard développent leur alliance, pour devenir incontournables. Le Québec et l’Ontario mis ensemble représentent la majorité de la population cana­dienne. Avec la baisse du prix du baril de pétrole et du dollar canadien, ces deux provinces pourraient reprendre du galon sur le plan économi­que grâce au secteur manufacturier. Une amitié politique solidement scellée avec l’Ontario pourrait être une carte qui accroît l’influence du Québec et de notre premier ministre sur la scène canadienne.
Philippe Couillard approche son rôle d’une façon différente de ses prédécesseurs libéraux. Il est plus enclin à jouer le jeu canadien à fond, plutôt que d’endosser la cape de défenseur des intérêts du Québec qui se méfie des autres provinces.
Il sera jugé sur ses résultats. Mais force est de constater que l’approche défensive de ses prédécesseurs n’a pas livré la marchandise. Je donne la chance au coureur quant aux progrès possibles avec cet axe Québec-Ontario.

samedi, avril 04, 2015

100$ par semaine par enfant: une aubaine!

http://www.journaldequebec.com/

Mario Dumont
Nos CPE me rendent perplexe. L’hypothèse de ne plus offrir le dîner par mesure d’économie a fait sursauter bien des parents cette semaine. À quelques jours de voir le tarif augmenter significativement pour une majorité de familles, une détérioration aussi claire du service ne pouvait que soulever la colère. Ladite colère ne fut qu’accentuée par le dossier du Journal sur le Congrès des cadres des CPE au Château Frontenac.
D’où part cette discussion autour d’un scénario de coupures dans les repas des petits? Évidemment, du fait que le gouvernement, dans ses politiques dites d’austérité, réclame un effort douloureux de 74 millions de dollars aux CPE. En entendant que nos garderies subventionnées sont si pauvres, je me suis questionné à nouveau sur le vrai coût d’une place pour l’État. Voici mes conclusions.
Vous êtes déjà au courant du fait que le 7,30 $ payé jusqu’à maintenant ne couvre qu’une infime partie du vrai coût. Mais avons-nous un portrait juste de ce coût véritable? Nous savons déjà que l’État ajoute environ 52 $ par enfant comme subvention de base pour chaque enfant. Mais la contribution de l’État dépasse largement ce versement pour chaque enfant.
Nombreuses subventions
Les CPE reçoivent aussi des allocations pour payer l’hypothèque, des compensations de taxes foncières, un remboursement de TVQ, des subventions pour l’entretien et l’amélioration des installations et des cours extérieures.
Il y a aussi une allocation pour les régimes d’assurance collective et de congés de maternité ainsi qu’une subvention spéciale pour le régime de retraite du personnel. On l’oubliait, à la suite des négociations qui sont survenues quelques années après l’implantation des CPE, le gouvernement du Québec a dû prévoir des sommes pour aider les garderies à financer les nouveaux régimes de retraite.
Bureaucratie
Puis, il y a la bureaucratie au-dessus de tout cela, bureaucratie qui s’est alourdie avec la création des bureaux coordonnateurs en 2006.
Si l’on réussissait vraiment à tout comptabiliser, à combien s’élèverait exactement le coût par enfant d’une place en garderie? Bien difficile à dire. Chose certaine, une enquête du FM 93 de Québec affirme que le budget total des services de garde subventionnés atteignait 2,33 milliards $ en 2014, par rapport à 1,2 milliard en 2003. Il s’agit d’une hausse de presque 100 %.
Une telle augmentation des coûts pour créer des places supplémentaires? Pas vraiment. À l’époque, il y avait 163 000 places à contribution réduite dans le réseau, contre 222 000 l’an dernier, une augmentation de 36 %.
Il y a près de 10 ans, alors que j’étais en politique, je parcourais le Québec en faisant la promotion d’une allocation familiale de 100 $ par enfant par semaine. Bien des sceptiques trouvaient l’idée trop audacieuse considérant les coûts élevés d’un tel transfert aux familles.
Si j’y repense dans le contexte d’aujourd’hui, alors que l’État investit aujourd’hui un montant dépassant les 60$ par jour par enfant pour le service de garde, cela fait 300 $ par semaine!
Le 100 $ par semaine de l’ADQ, finalement, c’était une aubaine!

jeudi, avril 02, 2015

Lettre aux jeunes dans la rue

http://www.journaldequebec.com/

Bloc austérité
PHOTO COURTOISIE
Mario Dumont
Vous serez des milliers à prendre la rue jeudi pour exprimer votre colère contre le gouvernement Couillard.
Que la jeunesse questionne l’ordre établi, cela va de soi, c’est même le signe d’une société en santé. Par contre, je m’explique mal comment le débat politique et économique a pu virer pour que la jeunesse d’une société ait l’air de se foutre qu’on continue à l’endetter.
À l’époque où j’étais militant (bon, ça fait un quart de siècle), beaucoup de jeunes contestaient en réclamant une plus grande équité entre les générations. Le marché du travail était fermé pour les jeunes. Les cotisations insuffisantes à la régie des rentes amenaient à croire que la caisse serait vide lorsque ma génération arriverait à la retraite.
De toutes les revendications qu’on ait pu faire en matière d’équité entre les générations, la plus significative demeure l’arrêt de l’endettement. Emprunter, c’est reporter le paiement d’une dépense. Dans le cycle de vie d’une famille, on emprunte quand on fonde une famille, par exemple pour l’achat d’une maison, et on rembourse ensuite. À moins de difficultés majeures, personne ne souhaite laisser à sa descendance un héritage de dettes.
Payer plus tard
Dans le cas d’un gouvernement, emprunter c’est carrément reporter la dépense sur les futurs payeurs d’impôt. Vous payez à crédit un salaire de fonctionnaire pour offrir un service public cette année, et quelqu’un qui est un enfant aujourd’hui remboursera quand il sera rendu sur le marché du travail plus tard. Pourquoi? En vertu de quel principe?
Il s’agit d’une injustice flagrante envers les futures générations. Vous, les jeunes qui marcheront jeudi, devriez inscrire cela sur vos pancartes. Mais en dénonçant l’austérité, l’impression donnée, c’est que vous demandez au gouvernement d’emprunter davantage.
Probablement que la dette, on en parle depuis trop longtemps, c’est devenu plate. Les gouvernements nous ont tellement dit qu’ils s’en occupaient, qu’il fallait se serrer la ceinture, qu’on n’entend plus. Et pourtant...
Toujours en hausse
Quand j’étais jeune militant et que je réclamais qu’on ne nous transfère pas ce fardeau sur la tête, la dette était de moins de 40 milliards et représentait 25 % du poids de l’économie. Aujourd’hui, la dette du gouvernement dépasse les 197 milliards et son poids dans l’économie a doublé.
Vous pensez que l’austérité va faire diminuer la dette? Attention. L’élimination du déficit n’empêchera pas le gouvernement d’emprunter pour les travaux d’infrastructures par exemple. Dans le budget Leitao, on prévoit donc que la dette du Québec passera de 197 milliards (l’an dernier) à 206 milliards cette année, 210 milliards l’an prochain, puis 214, 216 et jusqu’à 220 milliards en 2020. En y ajoutant les réseaux et les sociétés d’État, la dette totale du gouvernement du Québec dépassera probablement les 300 milliards en 2020!
On peut avoir 20 ans et trouver que ce sujet de la dette, c’est pas chill, c’est pascool, c’est full poche. Mais en marchant, vous ne pouvez pas faire abstraction que ce poids pèse sur vos têtes.

jeudi, mars 26, 2015

Tant de sueur

http://www.journaldemontreal.com/

Mario Dumont
Jeudi après-midi peu après 16 h, notre ministre des Finances va annoncer que le budget qu’il dépose est équilibré. Moment d’émotion: le Québec n’aura pas besoin d’emprunter pour financer ses dépenses courantes, contrairement aux dernières années. Pour apprécier l’importance du moment, je me permets de rappeler l’ampleur des efforts qui ont été nécessaires pour y arriver.
D’abord, le ministre Raymond Bachand, à l’ère Charest, avait donné un coup de bélier du côté des revenus. Hausse de deux points de la TVQ, nouvelle contribution santé, taxe sur l’essence relevée en plus d’autres hausses de tarifs comme l’électricité... et les frais de scolarité. Vous vous souvenez d’un printemps de manifestations étudiantes mémorables.
Il faut se pincer pour croire aux difficultés, aux sacrifices et au temps qu’il faut pour éliminer un déficit
Puis, le PQ a pris les commandes. Pauline Marois et Nicolas Marceau ont d’abord gardé le cap courageusement sur un retour au déficit zéro lors du budget 2013-14. Ils ont bûché dur pour garder le contrôle sur les dépenses. Même Agnès Maltais a subi les foudres de ses alliés des groupes communautaires pour des coupes à l’aide sociale.
Après un peu plus d’un an au pouvoir, le gouvernement péquiste a baissé les bras et reporté de deux ans le retour à l’équilibre, ne voyant pas comment il pouvait y arriver en situation minoritaire. Puis les libéraux sont revenus au pouvoir.
Austérité !
Dès son élection, Philippe Couillard met en priorité l’élimination du déficit. Un nouveau psychodrame s’amorce alors: l’austérité. Nous macérons là-dedans depuis un an. Chaque année, nos gouvernements ont trouvé quelques moyens imaginatifs pour en soutirer un peu plus dans la poche de contribuables déjà lessivés. C’est notamment par le truchement des taxes scolaires qu’on a saigné encore nos portefeuilles tout en jurant ne pas le faire.
Je décris le parcours infiniment complexe de l’élimination du déficit surtout pour le comparer avec le chemin inverse. Comment étions-nous retombés en déficit? Dans les années 2000, le budget était équilibré. Mais dès qu’une crise financière a frappé, le Québec est replongé instantanément de 5 milliards dans le rouge.
Si fragile
Il faut se pincer pour croire aux difficultés, aux sacrifices et au temps qu’il faut pour éliminer un déficit qui se creuse en criant ciseau. On tombe en déficit comme on déboule un escalier, puis on sue des années pour remonter.
Il faut rappeler que nous nous sommes donné un filet social, lequel inclut plusieurs programmes qui ressentent vite l’impact d’un ralentissement économique. L’aide sociale n’est pas un programme avec une enveloppe limitée. Il y a des critères et si plus de gens perdent leur emploi et vivent une détérioration de leur situation économique, ils auront tous le droit à cette aide de dernier recours, quelle que soit la facture. Plusieurs autres programmes fonctionnent sur le même modèle.
En période de crise économique, les gouvernements vivent donc une pression sur leurs programmes sociaux en plus d’accentuer les dépenses publiques dans le but d’aider la relance.
Nous arrivons à l’équilibre budgétaire. Bravo! Toutefois, la prudence et la rigueur restent de mise face aux demandes infinies qui afflueront maintenant.