Annonce

lundi, août 22, 2016

VENTE DE RONA L’opposition veut obtenir des réponses


http://www.ledevoir.com/politique/quebec/

Le PQ, la CAQ et QS demandent d’entendre l’ex-ministre des Transports Jacques Daoust, qui a été remplacé samedi par Laurent Lessard

22 août 2016 | Philippe Orfali - Avec La Presse canadienne | Québec
Le premier ministre Couillard et son nouveau ministre des Transports, Laurent Lessard
Photo: Clément Allard La Presse canadienne
Le premier ministre Couillard et son nouveau ministre des Transports, Laurent Lessard
Les partis d’opposition à Québec n’en démordent pas : malgré la démission du ministre des Transports, Jacques Daoust, et son remplacement, samedi, par Laurent Lessard, une commission parlementaire demeure « essentielle » afin de faire toute la lumière sur la vente de Rona à des intérêts américains.
 
Contraint samedi de procéder à un quatrième remaniement ministériel depuis le début de l’année, le premier ministre Philippe Couillard a choisi Laurent Lessard pour succéder à Jacques Daoust à titre de ministre des Transports. C’est Luc Blanchette, le ministre délégué aux Mines, qui hérite des anciennes responsabilités de M. Lessard (Forêt, Faunes et Parcs), tandis que le ministre de l’Énergie, Pierre Arcand, reprend le dossier minier.
 
Vendredi, M. Daoust quittait la vie politique dans la foulée de révélations concernant la vente du quincaillier. L’ex-chef de cabinet du ministre Daoust, Pierre Ouellet, avait autorisé par un« OK » envoyé par courriel la vente de 11 millions d’actions de Rona au géant Lowe’s par Investissement Québec (IQ), ce qui contredit la version de M. Daoust, qui avait toujours prétendu ne pas avoir été mis au courant et ne pas avoir approuvé la transaction.
 
Trois « témoins-clés »
 
Pour comprendre ce qui s’est véritablement passé, le Parti québécois, la Coalition avenir Québec et Québec solidaire demandent maintenant que M. Daoust, M. Ouellet et l’ex-président de Rona, Robert Dutton, soient entendus en commission parlementaire. Le leader parlementaire de la CAQ, François Bonnardel, a acheminé dimanche au président de la Commission de l’économie et du travail une lettre demandant que ces « témoins-clés »répondent aux questions des membres de la commission, jeudi, alors qu’elle doit se pencher sur la vente controversée de Rona.
 
Il ajoute que les Québécois sont en droit de savoir qui a autorisé la liquidation de la participation d’IQ dans l’actionnariat du quincaillier. « Est-ce le cabinet du premier ministre ? Le secrétaire général du gouvernement ? Le cabinet du ministre des Finances ? Contrairement aux prétentions de Philippe Couillard, le dossier est loin d’être clos. Puisqu’il refuse de répondre aux questions, espérons que les libéraux, majoritaires sur la Commission, aient au moins la décence d’accepter qu’on entende », ces trois personnes, a martelé M. Bonnardel.
 
Les élus de Québec solidaire tiennent aussi à prendre connaissance des explications de M. Ouellet. La députée de Sainte-Marie–Saint-Jacques, Manon Massé, a lancé que le premier ministre Philippe Couillard lui-même doit s’assurer que Pierre Ouellet sera entendu par la Commission. Ce serait la meilleure façon de connaître « la version finale » de cette saga, a-t-elle estimé en entrevue à La Presse canadienne.
 
Même son de cloche du côté du PQ, qui déjà vendredi réclamait la comparution de M. Ouellet. En mêlée de presse samedi, le chef intérimaire, Sylvain Gaudreault, a dit vouloir savoir ce qui s’est passé entre le moment où le vice-président principal d’IQ, Jean-Jacques Carrier, a envoyé un courriel à M. Ouellet pour demander l’aval du gouvernement pour la vente d’actions et l’autorisation octroyée par ce dernier. « Un chef de cabinet est redevable devant le bureau du premier ministre, alors forcément, il est allé chercher l’accord du premier ministre », soutient-il.
 
Philippe Couillard dit ne pas s’opposer à ce que l’ex-chef de cabinet de M. Daoust comparaisse. « Je n’ai pas de problème avec ça », a-t-il affirmé. Ce sont les libéraux, majoritaires à la commission, qui trancheront au cours des prochains jours.

DÉMISSION DE JACQUES DAOUST La responsabilité

http://www.ledevoir.com/politique/quebec/

20 août 2016 |Antoine Robitaille | Québec
Jacques Daoust se consacrera donc désormais entièrement à son vignoble. Le départ de la vie politique de cet ancien mandarin, qui a tenté de se muer en ministre depuis 2014, n’est pas en soi surprenant, mais soulève des questions quant aux raisons qui l’y ont conduit. Ses tribulations imposent aussi une réflexion sur l’antique notion de « responsabilité ministérielle », censée être au coeur de notre régime politique.

llustre membre du « trio économique » libéral, Jacques Daoust n’aurait pas toujours été un joueur d’équipe, volant allègrement les rondelles à ses collègues ; de nature désinvolte, il aurait parfois pris ses fonctions à la légère ; ce « mononcle » fut dépassé par la technologie (dans le dossier Uber… et quant au logiciel Word, dont il ne comprenait rien aux fonctions de pagination) ; il pouvait être opiniâtre à en faire rager ses subalternes, etc. Il se dit beaucoup de choses sur le ministre démissionnaire Jacques Daoust. Mais ce n’était pas un politicien sans qualités. L’opiniâtreté en politique peut parfois indiquer des convictions réelles. Chose certaine, M. Daoust savait s’exprimer clairement, qualité rare dans notre classe politique.
 
La controverse ayant débouché sur son départ comporte toutefois plusieurs zones d’ombre. On comprend qu’Investissement Québec (IQ) n’était pas tenu, techniquement, d’obtenir l’autorisation du gouvernement pour vendre des blocs d’actions de Rona — acquises en 2012 après une commande politique du gouvernement Charest afin de bloquer la vente du fleuron à l’américaine Lowe’s. IQ a donc commencé à s’en délester à partir de novembre 2013. De décembre 2014 à février 2015, elle vend le dernier bloc : 10,1 millions d’actions. La vérificatrice générale, Guylaine Leclerc, écrivait en juin que les membres du conseil « ne considéraient pas avoir toute la latitude pour autoriser la vente sans avoir consulté le gouvernement ». Ce qu’ils firent. Mais M. Daoust, en juin, était formel : il n’avait jamais autorisé une telle chose.
 
Coup de théâtre : des courriels dévoilés par TVA ont prouvé jeudi que son chef de cabinet de l’époque, Pierre Ouellet, l’a autorisé, lui, après consultation. Auprès de qui ? M. Daoust persiste et répète jusque dans sa lettre de démission qu’il n’en a jamais été informé. N’est-ce pas étrange ? Sommes-nous devant un syndrome Gérald-Tremblay ? De deux choses l’une, répètent plusieurs, M. Daoust était « soit menteur, soit incompétent ». Et si la réalité était moins dichotomique ? Et si le premier ministre lui-même, ou son cabinet — de qui relevait M. Ouellet après tout — avait donné son accord ? Pour reprendre les termes de Philippe Couillard : voilà une question sérieuse qui exige une réponse sérieuse. De la part du premier ministre.
 
Le ministre démissionnaire avait au moins un grand défaut. Et ses réponses, dans les deux dernières crises auxquelles il s’est heurté — celle de l’opacité du ministère des Transports et celle des actions de Rona —, l’ont démontré clairement. Il cultivait une conception très faible de la responsabilité ministérielle. Encore vendredi matin, il martelait au micro de Paul Arcand qu’il ne démissionnerait pas. Son ministère a potentiellement pris des décisions controversées ? « Le ministère, c’est l’administratif, c’est pas moi. » Réponse inacceptable, évidemment. Comme sa réaction dans l’affaire Annie Trudel, du nom de cette analyse, embauchée par Robert Poëti, qui s’était plainte, dans une lettre, d’avoir fait face à des résistances troublantes, voire illicites. La lettre ? « Pas vue », avait soutenu M. Daoust. La faute ? Au chef de cabinet. Et aussi à la sous-ministre. M. Couillard avait alors choisi de croire à cette version et avait feint d’ignorer le principe de responsabilité ministérielle. C’est M. Ouellet et Mme Dominique Savoie qui furent sacrifiés.
 
Le site de l’Assemblée nationale propose une définition claire de la responsabilité ministérielle : « Les ministres sont individuellement responsables de la gestion de leur ministère. […] Devant l’Assemblée, un ministre doit répondre non seulement de ses propres actions, mais aussi de celles de ses fonctionnaires. Il pourrait même être forcé de démissionner en raison d’un cas important de mauvaise gestion. » Dans le cas Jacques Daoust, on aura attendu un peu trop longtemps avant d’appliquer le principe. Mais n’est-ce pas une habitude dans ce gouvernement ? Pensons à Lise Thériault, jadis ministre de la Sécurité publique, qui avait reproché publiquement à ses fonctionnaires de lui avoir menti à la suite de l’évasion héliportée de 2014 à la prison d’Orsainville.
 
Après les deux événements de non-responsabilité ministérielle qui ont ponctué la brève carrière politique de M. Daoust, il était temps de dire : « Quand le vin est tiré, il faut le boire. »

Jacques Daoust : bouclier humain!

http://www.journaldemontreal.com/

MISE à JOUR 
  La démission du ministre des Transports s’avère fort utile pour Philippe Couillard, car il n’aura pas les réponses claires qu’il souhaitait aux interrogations sérieuses qui auraient pu le mettre dans l’embarras. Est-ce que le premier ministre voulait vraiment avoir des réponses où était-ce sa façon de demander, lors de son point de presse, à Jacques Daoust de se sacrifier pour lui?
Ce dernier épisode dans la vente de RONA ajoute au rocambolesque de cette comédie d’erreurs du gouvernement libéral dans cette affaire. Nous nous souviendrons qu’en février dernier, la première réaction de la toute fraiche ministre de l’Économie, Dominique Anglade, était de se réjouir de cette transaction. Devant le tollé de protestations de l’opposition et les questions embêtantes de la jungle médiatique, elle s’empressa de faire quelques nuances pour faire baisser la vapeur. Il est raisonnable de croire que ses premières réjouissances et les réajustements consécutifs furent dictés par la garde rapprochée du premier ministre et peut-être par lui-même.
À partir du moment où il est devenu évident que cette transaction n’a pu se faire qu’avec le désengagement d’Investissement Québec et l’aval des autorités politiques au niveau le plus élevé, il s’est engagé une partie de cache-cache pour tenter de dissimuler la chaine de commandement dans toute cette affaire. Le ministre Daoust a plaidé l’ignorance jusqu’à la fin et a démissionné dans une manœuvre ultime pour mettre à l’abri son chef en espérant faire taire le questionnement sur ce que savait véritablement le gouvernement.
Si le premier ministre Couillard tenait tant à des réponses, il s’empresserait de convoquer une commission parlementaire pour faire toute la lumière sur la question. Toutefois, je ne crois pas qu’il le fera, car quelle qu’en soit l’issue, elle ne pourrait que démontrer son ineptie. Si l’ignorance des autorités politiques y étaient démontrée, cela reflèterait une incompétence crasse aux plus hauts échelons de l’État. Dans le cas contraire où la preuve serait faite que le ministre et son chef ont autorisé le désinvestissement dans RONA et contribué à sa vente, cela révèlerait un gouvernement qui ment délibérément aux institutions et à sa population.
Philippe Couillard a fait campagne en prétendant que la corruption et l’opacité étaient choses du passé. Il promettait un gouvernement transparent pour se faire élire. Bien naïvement, plusieurs ont cru ses belles promesses d’un parti libéral plus blanc que blanc, mais la réalité les rattrape aujourd’hui. Il est difficile pour un parti qui reposait énormément sur un financement corporatif et très faiblement sur une base populaire de devenir intègre du jour au lendemain et les vieilles habitudes ont tôt fait de reprendre le dessus.
Après qu’il ait tassé le ministre Poëti, sacrifié madame Savoie, la sous-ministre aux Transports, ainsi que le chef de cabinet Pierre Ouellet et largué Jacques Daoust, qui sera le prochain bouclier humain du premier ministre pour lui sauver les « fesses » dans les prochains tumultes qui secoueront ce gouvernement? En attendant, je prends acte qu’il ne veut surtout pas avoir de réponses claires aux interrogations sérieuses et qu’il s’est rapidement satisfait de la démission de Jacques Daoust.