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samedi, mars 05, 2016

Mais où est passé le rock québécois?

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Mise à jour le jeudi 3 mars 2016 à 17 h 14 HNE

Le groupe Grimskunk, en 2012Le groupe Grimskunk, en 2012  Photo :  Josée Guérin
Commençons par un état des lieux. Où en est la musique rock (et ses dérivés) au Québec en 2016?
Un texte de Philippe RezzonicoTwitterCourriel
À l'occasion du début de l'événement Ligue Rock, auquel participe cette année des vétérans du rock québécois, comme Aut'Chose, Grimskunk et WD-40, ainsi que des plus jeunes comme Oktoplut et Prieur & Landry, tentons de répondre la question.
Pour nous aider à y voir plus clair : Sébastien Collin, fondateur de la Ligue Rock, ainsi que deuxdes figures les plus respectées du rock au Québec, Franz Schuller et Vincent Peake.
« La musique rock elle-même est plutôt bonne, mais elle est complètement ignorée dans tous les médias, à l'exception de l'indie-rock. Les gens sont plus ou moins conscients de son existence. De plus, les nouveaux bands rock sont plutôt rares en ce moment. Ceux qui existent, par contre, sont pas mal cool! »— Franz Schuller, chanteur de Grimskunk et fondateur de l'étiquette de disques québécoise Indica
Le rock et ses sous-genres ont défini le paysage musical populaire et planétaire durant quatre ou cinq décennies. Cette musique risque-t-elle de devenir une musique de niche?
« Oui et non, lance Schuller. Elle l'est en ce moment, car peu en font, encore moins de gens la suivent, et personne ne la diffuse. Mais, malgré la pire - et de loin - époque de l'histoire pour le rock que nous traversons depuis cinq à huit ans, jamais je ne vais croire que la musique qui a donné naissance à toute la musique populaire sous toutes ses formes depuis 60 ans va disparaître de la carte. Ce n'est pas vrai. »
« Personnellement, j'ai toujours écouté et aimé la pop, le reggae, le folk, la world, etc. Mais j'ai envie et besoin d'un peu de rock dans ma vie! Des couilles, des guitares, de l'énergie brute viscérale, cela nous libère comme aucune autre musique ne peut le faire. »— Franz Schuller
Aimer le rock est une chose. En vivre au Québec en est une autre. Figure de proue de Groovy Aardwark, un autre groupe marquant du Québec s'il en est un, Vincent Peake sera un homme occupé lors des trois fins de semaine de mars où 15 groupes se partageront les scènes du Divan Orange (Montréal), du Zaricot (Saint-Hyacinthe) et du Cercle (Québec).
© Radio-Canada/Ronald Georges | Franz Schuller et Vincent Peake de Grimskunk.Franz Schuller et Vincent Peake  Photo :  ICI Radio-Canada/Ronald Georges
Vivre du rock
Peake se produira avec Aut'Chose, Grimskunk et Floating Widget dans chacune des villes. Tiens... Est-ce que multiplier les collaborations musicales est la solution pour un musicien afin de vivre de son art dans le monde du rock au Québec en 2016?
« Aucun band avec lequel j'ai joué n'a pu m'assurer une sécurité financière. Pas dans le rock alternatif en tout cas. Depuis 15 ans, je participe à plusieurs projets. Je me suis donné le droit de jouer dans un autre band que Groovy. C'était mal vu, à l'époque. »— Vincent Peake
« Il y a plusieurs musiciens qui ont une job de jour. J'ai réussi à faire ce que j'aime. Je ne vis que de la musique. Je ne fais pas de concessions et je ne fais pas de reprises. Mes amis de Floating Widget ont des jobs de jour. L'un à Radio-Canada, l'autre à la bourse... » »— Vincent Peake
Pour l'amour du rock
Sébastien Collin a mis sur pied la Ligue Rock il y a cinq ans en raison de son amour pour le genre musical. Et aussi pour le faire rayonner.
« Le rock n'est plus la musique la plus populaire qui soit, mais elle a atteint un autre niveau de qualité, dit le fondateur dans la trentaine, pour qui l'âge d'or du rock québécois rime avec Grimskunk, Groovy Aardwark et Vulgaires Machins. Un groupe qui a vu le jour après 2010 a besoin d'avoir un univers riche pour se démarquer. »
« Je crois que le public en est un de plus de plus de mélomanes. On n'a plus l'écoute d'autrefois. L'oreille se raffine. Si tu ne crées pas en 2016 des albums qui sonnent un peu... Il faut que tu sois de niveau. »— Sébastien Collin
« Un festival comme la Ligue Rock permet tout simplement de diffuser la musique rock pour que les gens la connaissent, l'entendent et y goûtent, assure Schuller. La génération des moins de 18 ans sait à peine ce que c'est que du vrai rock. C'est quand même ridicule, le rock (avec le hip-hop), c'est LA musique des jeunes, de la rébellion, de la contestation, et de la jeunesse même. Je trouve cela absurde que les jeunes n'en soient même pas conscients. »
Vivre dans la marge
Hard rock, alternatif, underground, stoner rock, métal... Ce ne sont pas les nuances et les sous-genres qui manquent. On peut arguer que le rock est moins populaire qu'avant, mais force est d'admettre que celui qui se fait chez nous est plus souvent issu de la marge que des courants classiques qui ont dominé les ondes radiophoniques dans la deuxième moitié du 20e siècle.
« Il y a eu une période un peu plus populaire (grosso modo, années 1990-2000), entre autres avec l'arrivée des Queens of the Stone Age, quand le stoner rock a proposé des chansons bien fignolées, pense Peake. Mais les gens qui font du rock underground n'ont pas de misère à évoluer dans la marge. Ils travaillent fort. Ils font un album aux deux ans et ils font beaucoup de tournées. »
« Si tu joues du rock, tu as deux choix possibles; le live et le web. That's it. Oublie complètement tout le reste. Il n'y a aucune ouverture médiatique ou même sociale. C'est complètement souterrain. Du bouche-à-oreille. »— Franz Schuller
« Il y a des genres pointus, mais quand même planétaires, précise Vincent Peake. Quand je regarde le métal, je vois à quel point il s'est extrémisé. Il est plus heavy, plus technique, plus rapide. Il y a là un réseau parallèle qui fonctionne très, très bien. Et c'est bien de voir les jeunes qui prennent ça à cœur et de voir que la qualité de ce qui se fait est à la hausse. »
Six à l'avant-plan
Aut'Chose, avec Vincent Peake et Lucien Francoeur notammentAut'Chose, avec Vincent Peake et Lucien Francoeur notamment  Photo :  Ronald Mc Gregor
Parmi les 15 groupes à l'affiche cette année à la Ligue Rock, six se produiront dans les trois villes. Héritiers de Nirvana et de Black Sabbath, le duo Prieur & Landry y va des riffs lourds et il plane sur les retours de son. Oktoplut ratisse dans les genres pop, punk et métal en français, tandis que Les Indiens font dans le rock stoner psychédélique, inspiré par des rythmes traditionnels des Premières Nations. Le trio de The Steady Swagger verse dans le folk trash et le rockabilly,Reanimator fait du métal et Le Havre concocte des chansons qui reposent sur des bases harmoniques et mélodiques. Large spectre musical, s'il en est un.
« Les six nouveaux groupes jouent du rock solide, assure Collin. Les premiers qui vont s'en rendre compte risquent d'être les bands cultes qui n'ont pas partagé la scène avec eux. Je suis convaincu que les amateurs de Grimskunk qui vont voir Prieur & Landry vont capoter. »
« L'an dernier, on mélangeait les genres. Cette fois, on mélange les genres, mais aussi les époques. Il est possible que les amateurs qui viendront voir les plus jeunes groupes voient certains des groupes plus âgés pour une première fois. Tu peux être passé à côté d'Aut'Chose si tu as 25 ans aujourd'hui. »
« Après quatre années avec la formule de "fausse compétition", j'avais l'impression d'avoir été au bout du concept, explique Collin. C'était un jeu qui était le fun avec les boîtes de votes, les vidéos, etc. Mais plus la qualité de la programmation augmentait, plus c'était évident que les gens venaient pour voir les groupes plutôt que pour la compétition. »
Ligue Rock 2016 se poursuit à Montréal, à Saint-Hyacinthe et à Québec.

Trois groupes québécois à découvrir
Barrasso
(Source : YouTube/Music Mansion Records)
Oktoplut
(Source : YouTube/slamdisques)
Mordicus
(Source : YouTube/Mordicus)

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