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samedi, mai 16, 2015

PKP: petits et gros défis

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Pierre Karl Peladeau
PHOTO D’ARCHIVES

Mario Dumont
Pierre Karl Péladeau a ce qu’il voulait: les rênes du Parti québécois se retrouvent dans ses mains.
Une victoire politique ne peut jamais être qualifiée de facile, mais disons qu’il n’a pas trop laissé de peau sur l’asphalte dans cette course (surtout si l’on compare avec sa chute à vélo). Il a mené du début à la fin et n’a même pas eu à multiplier les engagements, donc il n’a pas eu à sacrifier sa marge de manœuvre pour la suite.
Le vrai défi, le gros, le gigantesque, c’est de faire revirer une tendance lourde en ramenant les Québécois à la souveraineté et au Parti québécois
Aujourd’hui, il fait face à une tâche herculéenne. Dès la semaine prochaine, il dirigera l’opposition officielle à l’Assemblée nationale. Il n’a pas une énorme expérience parlementaire et il fera face à des libéraux qui l’attendent de pied ferme et qui sont passés maîtres dans l’art de démolir l’image des adversaires en face d’eux.
De plus, le rôle d’opposition n’est pas un naturel pour l’ex-PDG. Habitué à prendre des décisions, à gérer des budgets et à donner les ordres, il n’y a rien de naturel pour lui dans le fait de se lever jour après jour pour critiquer ou questionner, dans l’espoir qu’un extrait se retrouve au bulletin de nouvelles.
L’homme bouillant
Comme nouveau chef, il doit aussi travailler sur son tempérament. Personne ne souhaite qu’un homme de caractère se transforme en mauviette, mais la patience est une vertu à cultiver en politique. La politique, c’est frustrant. Les choses qui apparaissent tellement logiques n’arrivent pas toujours. À l’inverse, des histoires saugrenues et imprévisibles viennent gâcher une semaine. Par-dessus tout, il faut diriger une équipe de gens au talent inégal et aux intentions variables.
Le chef Péladeau doit aussi diriger le Parti québécois. J’écris cela sourire en coin en pensant à ses prédécesseurs qui ont rongé leur frein entre les querelles internes et les déclarations des anciens chefs. Pauline Marois avait réussi à discipliner ce parti, notamment parce qu’elle le connaissait sous toutes ses coutures. PKP pourra-t-il poursuivre dans cette voie? J’en doute. Quelques heurts me semblent à prévoir.
À travers cela, il se retrouve avec tous les devoirs de base: réorganiser le parti, s’assurer qu’il est en santé financière, trouver les candidats, visiter les comtés, consoler les députés dans les mauvais jours, etc. Chef de parti, c’est comme PDG d’une compagnie pauvre, avec des lignes de commandement peu claires puisque la majorité des gens sont bénévoles. Tout un défi.
Le GROS défi
Malgré tout, l’ensemble de ce que je viens de décrire constitue le petit défi du nouveau chef. Le vrai défi, le gros, le gigantesque, c’est de faire revirer une tendance lourde en ramenant les Québécois à la souveraineté et au Parti québécois. Depuis l’élection de Jacques Parizeau en 1994 et le référendum à 49,5 % de 1995, le PQ n’a connu qu’une direction: vers le bas. Même chose pour le Bloc.
La souveraineté ne mobilise plus. Même si les sondages donnent encore entre 35 et 40 % à l’idée, on ne sent plus qu’elle soulève les foules. La seule évocation d’un possible référendum lors de la campagne de 2014 a littéralement coulé Pauline Marois.
Pierre Karl Péladeau doit trouver le discours, établir la confiance et créer les circonstances pour rallumer cette flamme. Rien n’est plus difficile que de renverser une tendance de fond.

PKP part de loin

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PKP, PQ, Peladeau
PHOTO D'ARCHIVES

Jean-Jacques Samson
Ça passe ou ça casse pour le Parti québécois. Pierre Karl Péladeau a obtenu des militants de ce parti le mandat fort qu’il réclamait. Pour un grand nombre de ces derniers, il est d’ailleurs depuis un an le sauveur inespéré.
Ceux qui, parmi eux, sont porteurs d’une des cartes de membre aux plus petits numéros, preuve de la profondeur de leurs racines au parti, mais qui s’étaient résignés à ne pas voir la souveraineté de leur vivant, ont retrouvé la foi.
D’autres, que le nationalisme du PQ à saveur trop identitaire, culturelle et linguistique avait fini par éloigner ces dernières années, ont trouvé un nouvel intérêt dans la forte identification de Pierre Karl Péladeau au développement économique du Québec.
Le membership n’a néanmoins pas dépassé 70 000 membres à la faveur de la course à la direction, soit la moitié de ce qu’il était en 2007.
Le parti d’une génération
Depuis 2003, le PQ a chuté jusqu’à 25 % des votes lors des élections générales de 2014. Avant 1998, il franchissait la barre des 40 % et il pouvait ainsi former des gouvernements, fort de sa longue avance chez l’électorat francophone.
Le dernier sondage Léger avant l’élection de 2014 reléguait le PQ au troisième rang chez les francophones, à 23 % seulement d’appuis. Plus grave encore, le PQ était le quatrième choix des moins de 45 ans. Seule sa clientèle vieillissante chez les 55-64 ans lui restait fidèle.
Le parti de René Lévesque est en voie de devenir le parti d’une génération. Les courbes le destinent au rang de tiers parti.
C’est de là que part Pierre Karl Péladeau samedi matin. Sans compter que l’option de la souveraineté est au plancher dans la population.
Les travaux d’Hercule
D’autre part, à l’intérieur du PQ comme dans l’ensemble de la population, PKP est ou grandement admiré ou détesté rageusement. Un gros travail de séduction s’impose à lui.
À compter de mardi, M. Péladeau fera face quotidiennement à Philippe Couillard. Un changement au poste stratégique de leader est nécessaire. Bernard Drainville, un excellent et rude parlementaire, est taillé sur mesure. Un réalignement part de là.
L’actionnaire de contrôle de Québecor est identifié au développement économique, et son nationalisme économique est bien connu.
L’économie a toujours été le talon d’Achille du Parti québécois, même si elle a été la marque de commerce d’un Bernard Landry depuis 1976. Mais il n’était pas un praticien issu du monde des affaires.
M. Péladeau devrait jouer cette carte à fond. La conjoncture s’y prête très bien. Les pertes d’emplois de qualité s’empilent par milliers: Aveos, Électrolux, Shell, MABE, Bombardier, Davie, etc.
L’identification corporative Alcan, inscrite dans le code génétique des Québécois, disparaîtra.
Si la souveraineté du Québec doit se faire, elle passera par des finances publiques saines et un taux de croissance économique fort.
De plus, à court terme, M. Péladeau est plus crédible que Philippe Couillard sur le terrain de l’économie.
Le PQ a été vu sous le gouvernement Marois comme une entrave au développement économique. Le renversement de cette perception est urgent.

La commission Charbonneau franchit le cap des 40 M$

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France Charbonneau, Juge
PHOTO JOURNAL DE MONTRÉAL, PIERRE-PAUL POULIN

France Charbonneau, Juge

Mélanie Colleu
La corruption dans l’industrie de la construction a coûté cher, mais enquêter sur cette corruption a aussi un prix. La commission Charbonneau a déjà coûté 40,8 M$, a appris Le Journal.
La plus grosse partie de cette somme est absorbée par les salaires des commissaires, procureurs, enquêteurs et analystes, détaillent des documents obtenus en vertu de la Loi sur l’accès à l’information.
En date du 31 mars 2015, leur rémunération totale s’élevait à 29 M$. Tandis que les coûts associés au fonctionnement de la commission d’enquête (sécurité, transcription, location d’équipement, etc.) atteignaient 11,8 M$.
3 M$ pour le trio de tête
Depuis le début des travaux – amorcés le 19 octobre 2011 –, trois acteurs emblématiques de la commission se sont partagé plus de trois millions de dollars.
Le commissaire Renaud Lachance, qui siégeait quotidiennement aux côtés de la juge Charbonneau, a empoché 1,4 M$ (toujours en date du 31 mars 2015).
Me Sonia Lebel, devenue procureure en chef en cours de mandat, a quant à elle touché un peu plus d’un million de dollars, tandis que le procureur Me Simon Tremblay a perçu 917 000 $.
Le salaire des autres procureurs, Me Paul Crépeau, Me Élizabeth Ferland, Me Cainnech Lussiaà-Berdou et Me Érika Porter, oscille pour sa part aux alentours de 500 000 $. Contrairement à ses collègues de travail, payés à taux horaire, la juge Charbonneau, reçoit un salaire établi par la Loi fédérale sur les juges (aux alentours de 290 000 $ par an).
Prolongation qui coûte cher
La deuxième prolongation accordée par le gouvernement à la commission Charbonneau entraînera inévitablement des déboursés supplémentaires.
Rappelons que le gouvernement Couillard lui a octroyé une seconde prolongation de sept mois, portant la date du dépôt du rapport final au 30 novembre 2015. Payer l’équipe des six procureurs encore en poste ainsi que le commissaire Renaud Lachance, pendant ces sept mois, coûtera près d’un million $.
«On aurait dû arrêter au bout de deux ans. On a étiré la sauce», constate Michel Nadeau, directeur général de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques. Selon lui, il faudra faire le ratio entre ce que la commission a apporté et ce qu’elle a coûté. «L’État québécois va-t-il récupérer de l’argent? Je n’en suis vraiment pas certain.»