Washington impose à nouveau des tarifs sur les importations de bois d’oeuvre canadien. Le Canada a tenté de négocier, en vain. Trump promettait de s’attaquer au Mexique et à la Chine, mais c’est le Canada qui prend les coups.
C'est la cinquième fois en trente ans que les Américains s’attaquent aux exportateurs canadiens de bois d’oeuvre. Chaque fois que le conflit a été porté devant des tribunaux indépendants, le Canada a gagné, mais au prix de milliers d’emplois perdus entre-temps.
Malgré ses défaites, la coalition américaine du bois d’oeuvre revient constamment à la charge pour exiger de son gouvernement qu’il impose à nouveau des droits compensateurs. Ce que Washington n’hésite jamais à faire pour des raisons électoralistes.
Faute de pouvoir faire reconnaître les décisions des tribunaux de l’ALENA ou de l’OMC dans cette industrie, le Canada est donc forcé de négocier des ententes à l’extérieur de l’ALENA qui l’obligent à s’imposer à lui-même des quotas ou des taxes pour avoir la paix pendant quelques années.
Depuis la fin de la dernière entente du genre signée en 2006 et prolongée jusqu’en 2015, Ottawa a tenté de renégocier avec l’industrie américaine, mais les exigences de celle-ci étaient si élevées qu’il a été impossible de conclure.
Hier, Québec a confirmé qu’il réservait 300 millions pour offrir des garanties de prêts aux entreprises touchées, surtout les plus petites qui devront verser des paiements rétroactifs, en attendant un éventuel règlement.
De son côté, Ottawa s’est contenté de dénoncer la décision américaine et d’inviter l’industrie canadienne à faire appel aux programmes d’aide existants… dont l’assurance-emploi. Pour l’avenir, on mise sur la Chine pour l’exportation du bois canadien, cette dictature avec laquelle Justin Trudeau rêve de signer un traité de libre-échange malgré l’absence de tribunaux impartiaux.
Autre dossier qui fait l’objet d’attaques répétées de Donald Trump, celui du lait. Hier, M. Trump a signé un autre de ses fameux décrets présidentiels destinés à combattre le protectionnisme du voisin tout en défendant le sien. À court terme, cela ne change rien, mais il est évident que la formule canadienne de gestion de l’offre sera remise en cause lors des prochaines négociations de l’ALENA.
Jusqu’à l’an dernier, certains producteurs américains profitaient d’une faille dans l’ALENA pour exporter du lait diafiltré destiné à la fabrication de fromage et de yogourt. Cela a conduit l’industrie canadienne à réduire le prix du lait utilisé pour ce type de produits, au grand dam des Américains incapables d’exporter le leur.
Faut-il pour autant mettre la hache dans la gestion de l’offre ? Les Américains n’ont pas accès au marché canadien pour plusieurs catégories de produits laitiers, mais en revanche, ils ne subissent pas la concurrence des Canadiens, qui se contentent de produire pour leur seul marché. Au final, le solde commercial est à l’avantage des Américains, contrairement à ce que prétend Donald Trump.
Il est vrai que cette façon de limiter la production aux seuls détenteurs de quotas locaux tout en imposant des tarifs de 250 % sur les importations jure dans un paysage de libre-échange. Difficile pour l’UPA, et pour le Canada, de défendre à la fois la fermeture des frontières au lait et à la volaille des autres tout en exigeant de leur part une pleine ouverture pour notre porc, notre bois d’oeuvre et notre sirop d’érable !
À moyen terme, il semble évident que les producteurs de lait et de volaille devront réformer leur système pour le rendre plus productif, plus créatif et plus ouvert sur le monde. De là à abolir la gestion de l’offre, il y a un pas qui est loin d’être franchi puisque cela devrait s’accompagner du rachat des quotas de production et du versement annuel de dizaines de millions en subventions sans avoir l’assurance d’une stabilité des prix pour les consommateurs.
Lors de la campagne électorale, Donald Trump promettait de faire disparaître les énormes surplus commerciaux enregistrés par la Chine et le Mexique. Jusqu’ici, c’est le Canada qui fait les frais de ses politiques malgré un ridicule surplus commercial de 3 milliards de dollars l’an dernier, soit l’équivalent d’une journée et demie d’échanges commerciaux, comparativement aux 380 milliards du surplus chinois. Encore une fois, les « faits alternatifs » ont parlé par la bouche de ce grand menteur qu’est Donald Trump.
Le premier ministre s’est montré préoccupé devant l’instauration possible d’une taxe.
L’instauration d’une taxe à la frontière canado-américaine, qui est discutée aux États-Unis depuis l’élection de Donald Trump, aurait un impact «très, très significatif» pour les produits d’ici, a prévenu vendredi le premier ministre Philippe Couillard.
À l’issue d’une journée d’échanges entre gens d’affaires québécois et américains, avec la Chambre de commerce du Montréal métropolitain et la Fédération des chambres de commerce du Québec, sur cette question de la relation commerciale Québec–États-Unis, le premier ministre s’est montré préoccupé devant l’instauration possible d’une telle taxe. Il a avoué ne pas avoir d’évaluation précise quant aux coûts supplémentaires qu’engendrerait une telle taxe, mais «tout le monde s’entend que l’impact serait très significatif, très, très significatif», a-t-il assuré.
«On parle de l’interruption soudaine des chaînes d’approvisionnement. Il faut savoir que, dans beaucoup de produits comme les produits automobiles et autres, les pièces qui mènent au produit fini passent la frontière souvent jusqu’à six, sept, huit fois. Vous voyez immédiatement les conséquences. Ça, c’est effectivement très préoccupant», a-t-il commenté.
Entente à trois ?
Par ailleurs, M. Couillard a réitéré sa préférence pour une entente commerciale trilatérale Canada–États-Unis–Mexique, mais semble prêt à envisager une entente bilatérale si les pourparlers à trois étaient freinés par un litige entre les États-Unis et le Mexique. «Il vaut mieux qu’on poursuive une démarche à trois. Mais si, par hasard, il devait y avoir des enjeux ou des obstacles majeurs qui freinent considérablement la progression des conversations avec le Mexique, c’est certain qu’on va vouloir, nous, avancer ce qu’on peut faire avancer plus rapidement. Mais actuellement, je crois qu’il est encore possible d’indiquer aux États-Unis qu’il est préférable, même pour eux, que le Mexique fasse partie de l’arrangement modifié», a commenté le premier ministre Couillard.
Aux côtés de M. Couillard, la présidente et chef de la direction du Canadian American Business Council, Maryscott Greenwood, a abondé dans ce sens. «Je suis d’accord avec l’idée d’essayer de garder ensemble les trois amigos, mais les trois amigos pourraient devenir les deux amis», a illustré Mme Greenwood. Elle s’est défendue de vouloir écarter d’avance le Mexique, mais a noté qu’à cause du contexte politique actuel aux États-Unis, «si la négociation avec le Mexique traîne en longueur, il sera préférable de discuter pour au moins “faire des progrès dans la relation Canada–États-Unis aussi rapidement que possible et s’en servir comme modèle”».
«La réalité politique aux États-Unis veut que ce serait plus facile de conclure une entente avec le Canada», a affirmé Mme Greenwood.