La chute a suivi la diffusion d’une enquête révélant que onze personnes reprochaient à Éric Salvail des inconduites sexuelles.
Celui qui a construit sa réputation par les médias l’a perdue par les mêmes moyens et avec une extrême fulgurance.
En quelques heures mercredi, l’animateur et producteur vedette Éric Salvail a quitté ses émissions de radio et de télé, comme ses contrats publicitaires.
Tout a pris le bord, Éric et les fantastiques de Rouge FM comme En mode Salvail sur le réseau V. Tous les contrats publicitaires lucratifs avec McDonald’s, Metro et Air Transat ont aussi disparu d’un coup.
Le sort d’autres créations de sa maison de production Salvail Co, y compris Les échangistesd’ICI Radio-Canada Télé, demeure à l’étude. Des millions de dollars de revenus annuels se retrouvent donc au bord de la trappe.
La chute dévastatrice a immédiatement suivi la diffusion d’une enquête de La Presse + révélant que onze personnes reprochaient à M. Salvail des inconduites sexuelles. Elles en auraient fait les frais ou en auraient été témoins au cours des dernières années, souvent dans un contexte de travail. Ce qu’il faut bien appeler « l’affaire Salvail » a été commenté par le maire de Montréal comme par la ministre de la Condition féminine, Hélène David.
« Je pense qu’on ne sort jamais complètement indemne d’une telle crise médiatique », commente Anne-Marie Gagné, professeure de la TELUQ, spécialiste de la gestion de crise en relations publiques. « Dans le cas d’une entreprise, si les accusations touchent le président, on change de président. On peut aussi gérer la marque d’une entreprise. Dans ce cas, la marque, c’est Éric Salvail lui-même. C’est sa réputation personnelle qui est touchée. Lui, je ne sais pas à quel point il va s’en sortir. En plus, on peut difficilement le distinguer de ses produits. Est-ce qu’on peut simplement changer l’animateur de ses émissions, dont certaines portent son nom ? »
La professeure pousse encore plus loin la distinction fondamentale entre une crise au sein d’une entreprise et une crise touchant une personnalité publique.
« Quand on a une crise dans une organisation, la stratégie demande d’être transparent, de ne pas se cacher, de ne pas utiliser la stratégie du “no comment”. Dans une crise de gestion de réputation personnelle comme celle que vit Éric Salvail, on se retrouve dans un autre paradigme : la discrétion s’impose et il faut se retirer. Il n’y a même pas de bonne stratégie de communication dans ce cas. »
C’est que les accusations génèrent appuis comme reproches, alors mieux vaut ne pas les stimuler. D’ailleurs, les réseaux sociaux débordent de réactions très critiques depuis mercredi matin.
Éric Salvail lui-même a suivi le modèle recommandé par les relations publiques en publiant une courte déclaration sur sa page Facebook. Il s’y déclare « fortement ébranlé ». Il dit éprouver « de l’empathie pour tous ceux et celles à qui [il a pu] causer un malaise ou quelque forme de préjudice que ce soit ». Il annonce finalement « prendre une pause professionnelle de quelques jours ».
« Il a eu une formule très sobre, dit encore la professeure. Puis, il annonce se retirer. C’est ce qu’il fallait faire. Ça ne sert à rien d’en rajouter pour l’instant et mieux vaut laisser la poussière retomber. »
Pendant combien de temps ? La spécialiste ne saurait dire. « C’est du cas par cas, explique-t-elle tout en insistant sur l’importance des apparences. En relations publiques, la perception, c’est la réalité. On travaille avec cette matière. Que ce soit vrai ou pas, peu importe, on travaille avec ce que les gens perçoivent. C’est avec cette perception qu’Éric Salvail aura à travailler plus tard. »
Cette primauté de la lecture et du regard d’autrui va tenir et l’emporter peu importe les décisions juridiques, même s’il est acquitté à la suite d’accusations. « Ce qui va rester au bout du compte, c’est ce que les gens vont croire comme vrai ou faux, résume encore Anne-Marie Gagné. Si la majorité des gens croient qu’il est coupable, que c’est un pervers sexuel, par exemple — je dis n’importe quoi —, c’est avec cette perception qu’il devra composer pour se réhabiliter, si réhabilitation il doit y avoir. »
18 octobre 2017 16h52 | Stéphanie Marin - La Presse canadienne
L’affaire et ses effetsÉric et les fantastiques. Le nom de l’animateur et le titre de l’émission quotidienne de Rouge FM ont été retirés du site du réseau tôt mercredi . Le 4@6 Rouge a pris le relais.
En mode Salvail. Le talk-show quotidien de fin de soirée est retiré des ondes de la chaîne V « pour une période indéterminée », dit le communiqué.
Salvail Co. Groupe V Média « évalue sa relation d’affaires avec la maison de production ». La compagnie produit En mode Salvail (sur les chaînes V et Max), mais aussi Les recettes pompettes, Ce soir tout est permis et Lip Sync Battle (Les trois sur V et MusiquePlus), Coup de foudre (V), Mariepier ! (Z) et Les échangistes (ICI RC Télé). Radio-Canada a annoncé réévaluer « ses liens d’affaires avec l’animateur et producteur »et que « des décisions à ce sujet seront prises selon l’évolution de la situation ».
Publicités. Plusieurs marques ont mis fin à leur partenariat avec Éric Salvail ou sa compagnie de production, dont les géants McDonald’s et Metro. Air Transat, qui organisait un concours, recule également. La campagne prorecyclage de Éco Entreprises Québec est terminée et il était déjà convenu qu’Éric Salvail ne serait pas reconduit comme son porte-parole. Les plus populaires
Gilbert Rozon vient d'annoncer qu'il quittait ses fonctions de président du Groupe Juste pour rire, de Commissaire aux célébrations du 375e de Montréal et de Vice-Président de la Chambre de Commerce du Montréal Métropolitain.
«Ébranlé par les allégations me concernant, je souhaite consacrer tout mon temps à faire le point», a-t-il expliqué dans une déclaration publiée sur sa page Facebook peu après 20h30.
Un peu plus tôt, en fin d'après-midi, il a été accusé par l'humoriste Guillaume Wagner d'être un «agresseur», en raison des allégations de plusieurs femmes qui auraient été victimes du grand patron de Juste pour rire.
Denis Coderre a réagi à la démission de l'homme qui en mène large dans l'industrie du spectacle à Montréal, et très impliqué dans les festivités du 375e de Montréal. «Face à des accusations comme celles qui sont avancées, c'était la bonne chose à faire. Laissons maintenant le processus suivre son cours», a-t-il commenté.
Plus tôt dans la journée, c'est au sujet des comportements sexuels inappropriés de l'animateur Éric Salvail, un de ses «amis», qu'il avait réagi, se disant «troublé» et «révolté».
M. Wagner rappelle qu'il a beaucoup travaillé pour Gilbert Rozon.
«Et puis j'ai entendu des histoires. Et puis d'autres. Et des récentes. Ça commence à sortir. Ça va continuer de sortir.»
«Je ne travaillerai plus pour Juste pour rire tant et aussi longtemps qu'un agresseur en sera le patron», a-t-il écrit sur son compte Facebook en fin de journée.
Guillaume Wagner a expliqué que sa décision était liée à l'affaire Éric Salvail, révélée par La Presse aujourd'hui: 11 personnes ont dénoncé plusieurs épisodes d'inconduite sexuelle de la part de l'animateur dans un contexte professionnel. L'humoriste a aussi été la cible de commentaires déplacés d'Éric Salvail.
En une heure, sa publication a été vue par plus de 3800 personnes, partagée par 800 internautes. Plus de 400 abonnés au compte de l'humoriste ont commenté ses propos, la grande majorité pour le féliciter de sa sortie.
«Il y a des années où mes participations à Juste pour rire représentaient presque la moitié de mon année de salaire», explique Guillaume Wagner dans son texte. «L'intégrité a un prix. Mais je ne payerai jamais aussi cher que les victimes. Quand des hommes brisent des vies, la moindre des choses est de briser le silence.»
(12h25) Le maire de Montréal, Denis Coderre, s'est dit «troublé, voire bouleversé, et révolté» par les révélations au sujet de l'animateur et producteur Éric... »
Photo: Pedro Ruiz Le DevoirL'animateur Éric Salvail
Se disant «fortement ébranlé» par les propos publiés mercredi matin au sujet d’allégations d’inconduite sexuelle qu’il aurait commises, l’animateur et producteur Éric Salvail prend une pause professionnelle. La chaîne V suspend quant à elle la diffusion de l'émission En mode Salvail.
Cette décision est survenue dans la foulée de nombreuses allégations rapportées mercredi dans La Presse +. Onze personnes ont raconté aux journalistes du quotidien – 10 sous le couvert de l’anonymat, mais un a accepté que son nom soit publié – avoir subi des inconduites sexuelles, ou en avoir été témoins, de la part du producteur et animateur Éric Salvail.
Dans une courte déclaration publiée sur sa page Facebook, l’homme dit aborder la situation avec énormément d’empathie pour tous ceux et celles à qui il aurait pu causer un malaise ou quelque forme de préjudice que ce soit. Il ajoute n’avoir jamais eu l’intention d’indisposer quiconque.
Il souligne qu’il va prendre une pause de quelques jours afin de faire le point sur la situation.
Groupe V Média a décidé de suspendre l’émission En mode Salvail des ondes de son réseau de télévision V dès mercredi pour une période indéterminée, à la suite des allégations visant son animateur.
« Groupe V Média évalue également présentement sa relation d’affaires avec la maison de production Salvail & Co. Le groupe n’émettra aucun autre commentaire pour le moment », a écrit l’entreprise dans un communiqué.
Depuis, la page Web de l’émission En mode Salvail a été retirée.
C’est aussi le cas de la page de son émission de radio sur les ondes de Rouge FM, Éric et les Fantastiques.
Le transporteur aérien Air Transat, qui avait lancé un concours « Direction en mode Salvail avec Air Transat », maintient la promotion pour ne pas priver les gagnants du concours de leur prix, mais a décidé d’annuler la présence d’Éric Salvail à l’activité promotionnelle organisée.
Les supermarchés Métro ont aussi décidé de suspendre leur entente publicitaire avec l’animateur et producteur Éric Salvail.
Réactions des politiciens
Réagissant aux allégations, le chef du Parti québécois, Jean-François Lisée, a déclaré qu’il est temps que les harceleurs sachent que leurs comportements inacceptables ne resteront pas impunis.
Questionné à ce sujet mercredi matin dans les couloirs de l’Assemblée nationale, M. Lisée a tenu à saluer l’homme qui a fait la dénonciation à visage découvert.
Il estime que les employeurs de M. Salvail doivent poser des gestes vu la lourdeur des accusations, mais qu’il doit aussi avoir l’occasion de donner sa version des faits.
La ministre des Relations internationales, Christine St-Pierre, a aussi rappelé que toute personne a droit à la présomption d’innocence.
Elle a toutefois qualifié les actes rapportés dans les allégations de «révoltants».
La ministre estime aussi qu’il est crucial que les victimes puissent dénoncer si elles le souhaitent, et qu’elles obtiennent de l’aide.