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Publié le 21 avril 2016 à 06h23 | Mis à jour à 06h23
« J'ai demandé de faire un balayage électronique dans mes bureaux, dans les bureaux de mon directeur des opérations, dans les endroits très sensibles (...) et on a même demandé à la Sûreté du Québec de faire une enquête », a dévoilé Robert Lafrenière.
Publié le 21 avril 2016 à 06h23 | Mis à jour à 06h23
PHOTO RYAN REMIORZ, ARCHIVES PC |
PIERRE SAINT-ARNAUD
La Presse Canadienne
La Presse Canadienne
Le commissaire à la lutte contre la corruption, Robert Lafrenière, a demandé à la Sûreté du Québec (SQ) de mener une enquête sur la tentative d'une personne non identifiée de fournir à plusieurs journalistes les éléments de preuve amassés contre l'ex-vice-première ministre Nathalie Normandeau.
Comparaissant mercredi soir devant la Commission des institutions, qui se penche sur les crédits du ministère de la Sécurité publique, M. Lafrenière a indiqué que cette affaire avait engendré tout un branle-bas de combat au sein de son organisation.
« J'ai fait faire très récemment une vérification complète de notre technologie informatique, au niveau de la robustesse, pour être sûr que nos pare-feu sont à date », a expliqué M. Lafrenière.
« J'ai demandé de faire un balayage électronique dans mes bureaux, dans les bureaux de mon directeur des opérations, dans les endroits très sensibles (...) et on a même demandé à la Sûreté du Québec de faire une enquête », a-t-il dévoilé.
Au moins quatre journalistes de la colline Parlementaire à Québec ont été approchés dans les jours ayant suivi l'arrestation de Mme Normandeau, en mars dernier, par un homme disant s'appeler « Pierre » qui leur a offert l'ensemble de la preuve, une démarche qui aurait pu faire dérailler totalement le procès de cette ancienne élue libérale si cette preuve avait été rendue publique avant d'être présentée au tribunal.
Indépendance et ingérence
Le commissaire Lafrenière a par ailleurs profité de son passage devant la commission parlementaire pour réclamer à nouveau le statut de corps policier pour l'UPAC, faisant valoir que son statut de coordination entre différents corps policiers l'entravait dans ses démarches d'enquête.
« Le système automatisé de renseignements criminels - le SARC - tous les corps policiers y versent de l'information. Les dossiers, les projets sont gérés dans cette banque-là. Le commissaire à la lutte contre la corruption n'y a pas accès, ce qui n'est pas normal », a-t-il fait valoir.
Il a ajouté que les autres corps policiers canadiens et internationaux sont prêts à fournir des renseignements, mais ne peuvent les donner directement à l'UPAC parce qu'elle n'est pas un corps policier.
« On ne peut pas échanger du renseignement », a déploré le commissaire.
Son passage a donné lieu à des échanges tendus entre le porte-parole péquiste en matière de Sécurité publique, Pascal Bérubé et le ministre Martin Coiteux. M. Bérubé s'est interrogé sur une apparence d'ingérence du ministre parce que celui-ci avait tenu une conférence de presse conjointe avec le commissaire Lafrenière, en septembre dernier, sur les investissements gouvernementaux pour les technologies de l'information.
« Ce n'était pas approprié et le ministre n'avait pas besoin de la présence du commissaire », a soutenu le député de Matane-Matapédia, allant jusqu'à affirmer que M. Lafrenière « enquête potentiellement sur la formation politique » de M. Coiteux.
Martin Coiteux a vivement réagi, reprochant à son vis-à-vis de se livrer à une « grande exagération ».
« D'insinuer que ça remet en question l'indépendance du commissaire, franchement, c'est un raccourci et, je le répète respectueusement pour le député qui veut faire des effets de style là-dessus, (je considère) qu'il est démagogique », a laissé tomber le ministre de la Sécurité publique, entraînant du coup une intervention du président de la commission parlementaire, qui l'a enjoint de retirer ses propos.
Pascal Bérubé a par ailleurs tenté de savoir combien d'enquêtes étaient en cours sur le financement politique, mais Robert Lafrenière n'a pas voulu s'avancer sur ce terrain, se contentant de dire que l'UPAC avait présentement 30 enquêtes criminelles actives et 16 enquêtes pénales et qu'elles portaient dans une proportion de deux pour une sur les milieux municipal et provincial.
Bureau des enquêtes indépendantes
Comparaissant à son tour devant la commission parlementaire, la directrice du Bureau des enquêtes indépendantes, Madeleine Giauque, a annoncé qu'elle s'attendait à ce que l'organisme soit opérationnel à partir de la deuxième semaine de juin, alors qu'on s'attendait à une entrée en fonction le premier avril.
Mme Giauque a précisé que l'ensemble des enquêteurs avait complété leur formation ce mercredi et qu'ils seraient diplômés le 29 avril.
Cependant, l'actualité a forcé le Bureau à ajouter une formation sur les agressions sexuelles qui débutera le 25 avril prochain.
« Même si cette formation n'était pas prévue, il m'est apparu au mois d'octobre dans la foulée des événements de Val-d'Or qu'éventuellement c'est un dossier, si on avait été en opération, qui serait arrivé sur notre bureau. »
La directrice du BEI faisait référence aux suites de l'émission « Enquête », qui avait causé une onde de choc dans la ville abitibienne en mettant au grand jour de graves allégations d'inconduite sexuelle de la part de policiers de la SQ dont plusieurs ont été suspendus à la suite de la diffusion du reportage de Radio-Canada.
Rien pour Puvirnituq
Le député caquiste de Beauce-Nord, André Spénard, a été l'un des seuls à aborder directement la question des crédits budgétaires du ministère de la Sécurité publique, en dénonçant l'absence de toute somme prévue pour améliorer la situation des détenus dans le Grand Nord.
La protectrice du citoyen, Raymonde Saint-Germain, a remis en février dernier un rapport accablant sur les conditions de détention dans les villages inuits à la suite d'une enquête dans laquelle elle a constaté plusieurs atteintes graves aux droits des détenus, particulièrement à Puvirnituq.
Son rapport fait état de la surpopulation des cellules du poste de police de cette communauté, où les détenus doivent vivre dans des conditions insalubres, sans accès au strict minimum en terme d'hygiène puisque les installations sanitaires y sont inutilisables. Selon elle, les détenus inuits sont incarcérés dans des conditions qui ne respectent ni les règles internationales ni les chartes des droits, les lois et les règlements.
« Pas une cenne pour Puvirnituq », s'est insurgé le député Spénard en brandissant les crédits du ministère de la Sécurité publique, soulignant que le gouvernement du Québec s'était contenté de demander des rapports et d'envoyer des serviettes alors qu'il fallait y construire des installations décentes.
Le ministre Coiteux s'est borné à répondre que le rapport de la protectrice du citoyen était récent et qu'il fallait une action concertée de plusieurs ministères pour s'attaquer à une problématique de longue date et nettement plus large que celle de la détention.
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