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NATHALIE ELGRABLY-LÉVY
MISE à JOUR
NATHALIE ELGRABLY-LÉVY
MISE à JOUR
Il y a vingt ans, 50,6 % des Québécois répondaient «Non» à la question référendaire. Cet anniversaire a remis l’Indépendance du Québec à l’avant-scène de l’actualité et les commentaires, qui fusent de toutes parts, oscillent entre la nostalgie et la rancœur, la résignation et la persévérance. Mais une question hante tous les souverainistes convaincus: «La prochaine fois sera-t-elle la bonne?»
Dans une déclaration fracassante dont le mouvement souverainiste porte encore les séquelles, Jacques Parizeau avait attribué la défaite référendaire à l’argent et au vote ethnique. Du point de vue strictement statistique, cette affirmation est évidemment fausse. De nombreux Québécois «de souche» et non fortunés avaient également décliné l’invitation du PQ.
Or, qu’ont fait le PQ et le mouvement souverainiste depuis vingt ans pour gagner la confiance et le soutien de ceux qui ont du succès ?
Mais du point de vue idéologique, voire philosophique, elle est fondée. L’«argent» et les nouveaux immigrants étaient effectivement hermétiques au projet souverainiste. Jacques Parizeau a peut-être manqué d’élégance dans sa formulation, et il a certainement mal choisi son moment, mais son diagnostic était avéré.
Face au constat, il aurait été logique que le PQ s’adonne à un examen de conscience. Quand un pan de la société rejette une option, lui faire tout simplement porter le blâme est stérile, voire contre-productif. Pour espérer que la prochaine fois soit la bonne, le mouvement souverainiste aurait donc dû s’ingénier à comprendre pourquoi certains ont résisté à l’appel du PQ, et à identifier ce qu’il avait à accomplir pour rallier les récalcitrants. Cela a-t-il été fait?
Prenons le cas de l’«argent». Par ce terme, M. Parizeau visait les «riches». La richesse étant l’expression matérielle du succès professionnel, il admettait implicitement que le projet indépendantiste rebutait les Québécois les plus productifs, ceux qui performent et qui réussissent ce qu’ils entreprennent.
Fardeaux plus lourds
Or, qu’ont fait le PQ et le mouvement souverainiste depuis vingt ans pour gagner la confiance et le soutien de ceux qui ont du succès? L’effort et la prise de risque sont-ils mieux récompensés? Les fardeaux fiscal et bureaucratique ont-ils été allégés? Pas du tout! Ils se sont même alourdis.
Selon les statistiques les plus récentes du ministère des Finances du Québec (qui datent de 2012!), les contribuables appartenant au quintile supérieur, soit les 20 % des plus riches, ont touché 51,3 % des revenus et ont payé 70,2 % des impôts. Quelques mois avant le référendum de 1995, ce quintile payait 64,6 % des impôts.
En matière de fiscalité des entreprises, le portrait est similaire. Les entreprises québécoises assument les coûts fiscaux les plus élevés au pays avec 5,1 % de la valeur de la production brute, contre 4,1 % au Canada. Elles doivent également composer avec le poids de la paperasse, la multiplication des réglementations et un environnement économique hostile aux affaires.
Des vaches à traire
Au lieu de respecter ceux qui performent, de valoriser la réussite et d’encourager l’initiative, l’État québécois voit les riches et les entrepreneurs comme des vaches à traire. Faut-il être surpris qu’ils refusent de lui donner plus de pouvoir?
Le référendum de 1995 a été perdu à cause de l’argent. Mais les souverainistes en ont-ils tiré une leçon? Ont-ils compris que tant que l’État restera accroché aux mamelles de la classe productive, celle-ci craindra l’indépendance? On ne donne pas les coudées franches à celui qui veut s’approprier le fruit de notre travail!