http://www.journaldemontreal.com/
THE CANADIAN PRESS |
Bernard Drainville avait commencé la course en deuxième position et menait une campagne sans faire trop de vagues, en espérant conserver sa place.
Distancé par Alexandre Cloutier, il avait changé sa stratégie, en devenant un candidat agressif.
Drainville le « kingmaker »
Cela lui donnait un air désespéré. Il craignait de terminer troisième. En se ralliant à PKP, il deviendra plutôt son numéro deux et se pose comme faiseur de roi. Il a bien joué et se rallie sans capituler. Contrairement à ce qu’on a dit, cette décision n’avait rien d’imprévisible, aussi crève-cœur soit-elle. Drainville avait misé sur un programme à trois volets. D’abord, un grand réalisme dans la poursuite de la souveraineté. Ensuite, une valorisation de l’aspect identitaire de l’indépendance. Enfin, une défense ferme et modérée du programme social-démocrate et écologique du PQ. Évidemment, en se ralliant à PKP, il se rallie à un autre programme que le sien sans l’abandonner. Il deviendra aussi, à sa manière, le gardien de certains points de programme.
Pierre Karl Péladeau en est évidemment le premier bénéficiaire. Si la tendance se maintient, PKP est maintenant assuré de passer de manière confortable au premier tour. Drainville lui apporte non seulement ses électeurs, mais aussi une bonne part de ses élus et son enracinement dans le parti. C’est un orateur doué, qui touche facilement la corde sensible des militants. Avec plus de fini et de raffinement, il occupe le créneau qui était autrefois celui d’un Jean Garon au PQ. Il sait parler aux électeurs de la CAQ. Le PQ en a besoin.
Cloutier, le « challenger »
Mais le deuxième bénéficiaire, inattendu celui-là, de ce ralliement, est Alexandre Cloutier. Il devient, en quelque sorte, le challenger officiel de PKP. Évidemment, Martine Ouellet est toujours dans le portrait. C’est une militante avant d’être une politicienne, ce qui plaît aux uns et exaspère les autres. Mais si elle s’attire ainsi les soutiens d’une partie de la base souverainiste, elle n’est pas le chouchou des médias. Alexandre Cloutier l’est. Si les journalistes choisissaient le prochain chef du PQ, il emporterait la chefferie aisément.
Cloutier a une occasion en or. Il peut transformer le ralliement de Bernard Drainville en opportunité et se présenter désormais comme le candidat de ralliement pour tous ceux qui redoutent l’arrivée de PKP à la tête du PQ. Cela pourrait conduire, paradoxalement, à une exacerbation des tensions dans la course. Mais cela comporte un grand risque pour Alexandre Cloutier: s’il pousse trop loin sa critique de PKP, si d’adversaire, il devient ennemi, il pourrait compromettre son avenir et celui du parti qu’il rêve un jour de diriger.
Mais l’essentiel ne doit pas nous échapper. Si PKP suscite les ralliements, c’est qu’il représente probablement la meilleure chance depuis longtemps du PQ de faire renaître son option. C’est un nationaliste décomplexé. Il est en politique pour faire l’indépendance. Avec lui, pour la première fois depuis longtemps, les souverainistes croient possible d’atteindre le pays avant qu’il ne soit trop tard. Ils n’ont pas l’éternité devant eux. Ils n’ont même pas 25 ans. N’est-ce pas?