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mercredi, novembre 01, 2017

René Lévesque, un leader exceptionnel, souvent contesté, toujours résilient

IDÉES – 30E ANNIVERSAIRE DE DÉCÈS
1 novembre 2017 | Michel Leduc - Ancien député du Parti québécois de Fabre, 1981-1985 | Québec
Si le Québec peut élever la tête parmi les nations du monde, souveraines ou non, c’est à René Lévesque que nous le devons en grande partie, estime l'auteur. 
Photo: Alain Renaud Archives Le Devoir
Si le Québec peut élever la tête parmi les nations du monde, souveraines ou non, c’est à René Lévesque que nous le devons en grande partie, estime l'auteur. 
René Lévesque était non conformiste et souvent irascible à l’endroit du parti qu’il a fondé. Fébrile de tempérament, individualiste dans le bon sens du terme, autonome et responsable, il pouvait aisément s’emporter. Lui et le Parti québécois ont eu de véritables prises de bec.
 
Et pourtant, on n’a pas assez souligné tout le respect qu’il avait à l’endroit des militants et des membres qui formaient la vaste majorité de ceux et celles pour qui il avait de l’admiration. Car sans eux et elles, il n’y aurait pas eu de parti sur lequel il aurait pu prendre appui, tel un levier indispensable pour élever les Québécois au-delà de leur état de survivance. C’est avec les membres issus de la population en général — travailleurs, syndiqués, enseignants : le « monde ordinaire » — d’abord qu’il comptait créer un parti propre et bien organisé dans toutes les régions du Québec même si ce fut difficile entre les campagnes électorales, car il fallait les convaincre que c’était possible de faire de la politique autrement là où la corruption était monnaie courante, où les caisses électorales étaient alimentées par les milieux financiers. Il fallait donc créer un parti propre qui ne vivrait que de la souscription volontaire de ses membres et sympathisants. C’est ce qu’il fit, à l’intérieur de son parti, avant même qu’il ait la possibilité de faire adopter la Loi sur le financement des partis politiques au Québec.
 
Député, militant, leader
 
J’ai eu le privilège, en tant que député et militant, de le côtoyer de près. Je crois, comme des milliers d’autres, en la nécessité de ce parti, car il a toujours sa raison d’être dans une ère que certains qualifient de postnationale. […] Tous les chefs qui ont succédé à son fondateur ont toujours invoqué sa mémoire inspirante pour l’avancement du Québec. Il fut celui qui occupa le poste de président le plus longtemps. De 1968 à 1985, année de sa démission, il n’a cessé de chercher le meilleur chemin qui pourrait contribuer à faire avancer le Québec vers sa souveraineté. À cet égard, ceux et celle qui lui ont succédé ont été fidèles à sa mémoire. Il n’a pas toujours réussi, pas plus que les autres, mais sa ténacité à poursuivre son idéal a marqué profondément le Québec.
 
Pendant ces 17 années comme chef du Parti québécois, René Lévesque fut un leader exceptionnel, souvent contesté, toujours résilient, prenant appui sur ses convictions, sa franchise, son charisme pour gagner le coeur de la population qui lui a toujours voué une grande admiration, souverainistes et fédéralistes confondus. Si le Québec peut élever la tête aujourd’hui parmi les nations du monde, souveraines ou non, c’est à lui que nous le devons en grande partie. L’homme avait ses défauts, comme tout un chacun, et aussi de grandes qualités puisqu’il a servi d’inspiration à tous ses successeurs par son action, son humanité, sa vision d’un Québec inclusif et attaché à ses racines, et avant tout pour sa profonde conviction qu’un Québec nation a sa place comme pays parmi tous les autres.
 
René Lévesque a interprété son rôle avec un sens éthique de responsabilité en tant que chef de parti et chef de gouvernement, en fonction de l’idéal de la souveraineté, phare incontournable du parti qu’il a fondé. […] Aujourd’hui, le Québec récolte les fruits de son travail et celui de son gouvernement alors que le présent se décline de plus en plus en fonction de la mondialisation qui affecte les soubassements de la société telle qu’on l’a connue jusqu’à maintenant.
 
Toujours des défis
 
Par ailleurs, les défis de son temps concernant la langue, la nation, l’identité, l’immigration, la souveraineté sont toujours d’actualité. Nos réflexions comme Québécois sur ces enjeux rencontrent les siennes. C’est en relisant ses mémoires, ses chroniques, ses discours qu’on découvre à quel point ses préoccupations rejoignent celles d’aujourd’hui et méritent qu’on s’y attarde pour trouver des points de repère et des raisons de poursuivre. L’action et la pensée de René Lévesque continuent de nous interpeller à travers son parti, mais aussi à travers les défis qui restent entiers pour la société québécoise. De même, son appel à la liberté et à la responsabilité collectives devrait continuer à inspirer tous les partis politiques en regard d’un Québec toujours à la recherche de modèles inspirants.
 
Pour René Lévesque, le changement était une nécessité. Mais pas à n’importe quel prix et pas n’importe comment. Il fallait que la population la plus mal prise et les travailleurs soient au centre des préoccupations de son parti. Il l’affirme clairement d’ailleurs dans une de ses chroniques en 1971 citant un extrait d’un « mini-manifeste » endossé par le Parti québécois à l’occasion de son Conseil national. Après avoir évoqué le principal changement et le plus « déterminant », soit « l’indépendance nationale », il ajoute : « […] il est quand même des catégories de notre peuple qui doivent être pour nous des interlocuteurs et en quelque sorte une clientèle privilégiée. D’abord, les plus démunis, ceux qui n’ont pas ou trop peu de voix pour se faire entendre ni de moyens pour se protéger… Puis les travailleurs québécois, dont une grande partie sont encadrés par des syndicats, mais une plus grande encore sans organisation. À ces derniers, nous devons notre appui pour mériter le leur. Avec les syndiqués et leurs organismes, nous partageons un objectif fondamental qui est celui de changer et d’humaniser la situation sociale et économique. »
 
Extrait d’un livre à paraître en 2018 : Un homme et son parti. Chroniques d’un militant.

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