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Le candidat républicain à l'élection présidentielle américaine, Donald Trump, le 15 août 2016. Photo Jeff Swensen. AFP |
Le candidat républicain n'en finit plus d'accuser les médias de truquer l'élection et de mentir. Au point de forcer une ONG new-yorkaise de protection des journalistes à publier un communiqué inédit.
Le billet d'Amérique
Trump, une menace pour la presse
Accusé d’agressions sexuelles à répétition, lâché par une partie de son camp, largué dans les sondages, Donald Trump est acculé. Mais loin de s’avouer vaincu, le milliardaire contre-attaque. Et cette semaine, il a fait des médias sa cible favorite, leur reprochant d’être à la solde d’Hillary Clinton et de relayer des accusations infondées à son encontre. «Toute cette élection est truquée. Ces mensonges répandus par les médias sans preuve sont en train d’empoisonner l’esprit de l’électorat», a-t-il lancé vendredi, lors d’un meeting en Caroline du Nord. Chez les partisans de Trump, cette stratégie du complot fait d’autant plus recette qu’elle se nourrit d’une rancœur tenace vis-à-vis de la sphère médiatique. Dans un sondage Gallup publié le mois dernier, seuls 14% des républicains interrogés disaient ainsi faire «fortement» ou «relativement» confiance aux médias d’information.
Dans les meetings du milliardaire, l’hostilité envers les journalistes a atteint ces jours-ci un niveau inédit. A l'image du violent réquisitoire livré jeudi soir en Floride par Donald Trump : «L’establishment et les médias exercent un contrôle sur cette nation par des moyens bien connus. Toute personne qui conteste leur domination est qualifiée de sexiste, raciste, xénophobe et de moralement anormale. Ils vous attaquent. Ils vous diffament. Ils cherchent à détruire votre carrière et votre famille. Ils cherchent à détruire tout ce qui vous concerne, y compris votre réputation. Ils mentent, mentent, mentent.» Chauffés à blanc par de telles diatribes, ses partisans huent, sifflent et insultent les représentants des médias, généralement parqués dans une zone entourée de barrières métalliques. Face au regain de tension, plusieurs reporters ont remarqué une présence accrue d’agents du Secret Service autour de cette zone réservée. Les chaînes CNN et NBC News, deux des cibles favorites de Donald Trump, disposent quant à elles de leur propre service de sécurité pour protéger journalistes et cameramen. «Même les reporters habitués depuis longtemps à la ferveur toxique des meetings de Trump ont été surpris - voire effrayés - par les attaques au vitriol de la foule», écrit le New York Times à propos du meeting de jeudi soir en Floride.
Dans ce contexte alarmant, le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), une ONG basée à New York, a publié un communiqué, du jamais vu s'agissant d'une campagne présidentielle américaine. «Donald Trump, à travers ses mots et ses actions en tant que candidat à la présidence des Etats-Unis, a constamment trahi les valeurs du Premier amendement», souligne le texte, en référence à l’article de la Constitution américaine garantissant la liberté d’expression et de presse. Le CPJ a annoncé en outre avoir «adopté une résolution déclarant Trump comme une menace sans précédent contre les droits des journalistes et contre la capacité du CPJ à défendre la liberté de la presse à travers le monde».
Sentant l’élection lui échapper, Donald Trump semble se réfugier dans un univers parallèle, où il serait la victime d'un complot politico-médiatique, d’accusations diffamatoires et de la fraude électorale. Un tel comportement n’est pas sans risque. En cas de défaite du milliardaire, personne ne peut anticiper la réaction de ses partisans, qui lui vouent une profonde adoration et voient en lui un messie capable de sauver les Etats-Unis de la destruction. En meeting à Cleveland, vendredi, Barack Obama a d’ailleurs estimé que «la démocratie même (était) en jeu» lors de ce scrutin présidentiel. «Donald Trump menace d’emprisonner ses opposants politiques. Ou de faire taire les médias. Il salue l’ingérence des Russes dans notre processus électoral, et suggère maintenant que si la campagne ne se déroule pas comme il l’entend, ce n’est pas à cause de ce qu’il dit, mais parce que l’élection est truquée et que c’est une imposture. Vous savez, certains pays fonctionnent comme ça, et ce sont des tyrannies qui pratiquent l’oppression», a tonné le président américain.
par Frédéric Autran, correspondant aux Etats-Unis
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