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Les anniversaires historiques sont importants. Ils nous permettent de nous situer dans le temps. Ces jours-ci, nous commémorons les 25 ans de l’échec de l’accord du lac Meech. On s’en souvient.
Selon les mots de Brian Mulroney, il devait permettre la réintégration du Québec dans la constitution dans l’honneur et l’enthousiasme, suite à son exclusion en 1982.
Meech
L’échec de Meech avait réveillé l’honneur national. Le sentiment dominant, c’était que le Québec avait tout essayé pour se faire reconnaître dans le Canada. Il s’était replié sur cinq conditions minimales pour signer la constitution. Elles étaient quand même trop élevées pour le Canada anglais. Le soir de la Saint-Jean, Jean Duceppe, dans un magnifique discours, tirait la conclusion qui s’imposait: le Québec est notre seul pays.
Jamais le Québec n’avait été aussi fort. Il tenait son avenir en main. Nos élites étaient solidaires et n’étaient pas encore soumises à l’idéologie de la mondialisation à tout prix. Même les gens d’affaires envisageaient positivement la souveraineté. On se demandait d’ailleurs si Robert Bourassa n’en prendrait pas l’initiative. La souveraineté, dans certains sondages, atteignait 60 %.
Les Québécois savaient encore qu’ils étaient une nation. En 1988, quand la Cour suprême avait invalidé plusieurs dispositions de la loi 101, le gouvernement libéral de Robert Bourassa avait utilisé la clause de dérogation (appelée clause nonobstant) pour imposer, malgré les «droits et libertés», l’affichage unilingue français. Il préférait défendre l’identité québécoise que les intérêts de sa base électorale anglophone. Bizarre, non?
Ni pays ni société distincte
Mais le Québec, depuis 25 ans, régresse. La Révolution tranquille avait formulé deux grands projets pour le Québec. Il devait soit devenir une société distincte dans le Canada, soit devenir un pays. Il n’est devenu ni l’un ni l’autre. Et aujourd’hui, il évolue sans trop s’en faire sous le règne d’une constitution qui nous a désarmés politiquement et psychologiquement. Pierre Elliot Trudeau voulait soumettre le Québec à sa vision du Canada. Il a gagné.
Le triste sort du PLQ est ici révélateur. Robert Bourassa disait qu’avec Meech, le Canada serait enfin un vrai pays pour le Québec. Doit-on comprendre qu’il ne l’est pas devenu? Chose certaine, avec Philippe Couillard, nos libéraux ne demandent plus rien aux provinces anglaises. Ils prennent la fédération telle qu’elle est. Selon la formule de Robert Laplante, ils n’ont plus aucun seuil de rupture avec le Canada.
À l’époque de Meech, le nationalisme était une conviction partagée au Québec. Est-ce encore le cas? À droite, surtout dans la région de Québec, on trouve une nouvelle génération qui rêve plus ou moins consciemment de s’américaniser ou du moins, de s’angliciser. Elle en vient à détester tout ce qui se rapproche d’une manière ou d’une autre de la souveraineté. À gauche, on s’imagine citoyen du monde et on fantasme sur le multiculturalisme.
Le commun des mortels n’a plus la tête à l’avenir du Québec. L’indépendance? Pour quoi faire? Réformer la fédération? À quoi bon? On prétend s’occuper des vraies affaires. C’est-à-dire qu’on gère le Québec avec des moyens réduits dans l’espace qu’Ottawa lui laisse. Et on s’apprête à voter pour un NPD qui entend empiéter comme jamais dans les compétences provinciales du Québec. Comme nation, avons-nous abdiqué? Bonne Saint-Jean quand même!