Philippe Couillard avait rêvé d’un accord constitutionnel menant à la signature de la Constitution canadienne par le Québec pour le 150e anniversaire de la fédération. Il a dû se contenter du dévoilement d’une politique d’affirmation nationale que n’auraient pas reniée ses prédécesseurs Jean Lesage, Claude Ryan ou Robert Bourassa.
Il faut saluer l’initiative de Philippe Couillard, qui en rendant publique la « Politique d’affirmation du Québec et de relations canadiennes » de son gouvernement sort les fédéralistes québécois du simple attentisme, de cette politique du « fruit qui n’est pas mûr » dont Jean Charest s’était fait l’artisan.
« Nous sommes Québécois avant tout, et c’est notre façon d’être Canadiens », a déclaré Philippe Couillard. On dit de lui qu’il est le plus fédéraliste des premiers ministres de l’histoire contemporaine du Québec. Il est certes celui qui manifeste l’affection la plus forte à l’endroit du Canada. On est loin d’un Robert Bourassa qui ne voyait dans la fédération canadienne que les avantages économiques. « L’allégeance québécoise » s’additionne à « l’appartenance canadienne », a fait valoir Philippe Couillard.
La nation québécoise n’est pas définie comme une nation ethnique au sens de la motion, votée à la Chambre des communes sous le gouvernement Harper, où il est question des « Québécois », en français dans le texte anglais. La nation québécoise est politique, libre de ses choix, composée d’une majorité de francophones, mais également d’une communauté de langue anglaise, qui reconnaît onze nations autochtones, une nation pluraliste « forte d’une grande diversité culturelle » qui s’intègre à la trame historique commune, à un « tronc commun » dans le cadre de l’interculturalisme.
La fédération canadienne est un « modèle plurinational », un « pacte » entre deux peuples fondateurs qui aurait dû inclure à l’origine les Premières Nations, a soutenu Philippe Couillard. Ce pacte fondateur a été rompu en 1982.
Certains ne verront rien de neuf dans cette politique d’affirmation nationale. Or c’est justement là son mérite, celui d’être orthodoxe, de correspondre aux principes qui ont été élaborés par les tenants du fédéralisme renouvelé, mais qui servent aussi de fondement aux aspirations souverainistes.
Quant aux revendications concrètes, Philippe Couillard s’en tient aux cinq conditions de l’accord du lac Meech, soit la reconnaissance de la nation québécoise (on parlait pudiquement de société distincte à l’époque), la participation à la nomination des trois juges québécois à la Cour suprême, un droit de veto sur les modifications constitutionnelles, un statut constitutionnel pour l’entente sur l’immigration et l’encadrement du pouvoir fédéral de dépenser. Ici, le premier ministre aurait pu faire preuve d’un peu plus d’inventivité. Ces cinq conditions étaient perçues comme un minimum par le gouvernement Bourassa et devaient d’ailleurs évoluer. Nous nous étonnons que le champ de la culture et des communications, par exemple, ne fasse pas partie des revendications, alors que le gouvernement Charest avait réclamé l’exclusivité de cette compétence.
Les négociations constitutionnelles ne sont que l’aboutissement de la démarche du gouvernement Couillard. D’ici là, le ministre Jean-Marc Fournier entamera un « dialogue » au Canada non seulement avec les responsables politiques, mais avec la société civile et les peuples autochtones. Il défendra cette idée d’un Canada plurinational.
« Dans le reste du Canada, il est fréquent de penser que le pays ne peut être formé que d’une seule nation », une « vision univoque » qui a triomphé en 1982, reconnaît toutefois son gouvernement dans la politique.
Justin Trudeau, de façon cavalière et avant même d’avoir lu le document, rejetait toute possibilité de rouvrir la Constitution. Ni pour le Québec ni pour les autochtones, doit-on conclure. Le premier ministre canadien a fait preuve d’une pitoyable légèreté.
En conférence de presse, Philippe Couillard a évoqué des sondages qui montrent un renforcement de l’attachement identitaire des jeunes Québécois à l’endroit du Canada, des jeunes qui ne sont d’ailleurs pas marqués par les stigmates du rejet de l’accord du lac Meech. Il en a conclu à l’échec historique du mouvement souverainiste. Or, paradoxalement, la faiblesse actuelle du mouvement souverainiste ne contribuera pas à ce que son message soit pris au sérieux au Canada anglais, pour lequel la question du Québec est réglée une fois pour toutes.
Il ne faut certes pas s’attendre à des résultats immédiats de cette politique ; il n’y a d’ailleurs aucune garantie de résultat. Mais au moins, Philippe Couillard envoie le signal que la nation québécoise, dans toute l’acception du terme, le concerne.
La direction du 98,5 FM a annoncé vendredi mettre fin au contrat de l’animateur Benoît Dutrizac.
Sur son site Internet, la direction du 98,5 FM mentionne un « vent de changement » dans sa programmation.
« Ce virage touche principalement l’émission du midi qui était animée depuis septembre 2007 par Benoît Dutrizac », peut-on lire.
On précise que le directeur général de la station, Michel Laurin, a mis fin au contrat de l’animateur.
Peu après l'annonce, Benoît Dutrizac a indiqué vouloir « laisser retomber la poussière » avant de commenter son renvoi du 98,5 FM.
Sur Twitter, l’animateur a remercié le public pour les messages qu’il reçoit, mais précise vouloir prendre le temps avant de commenter.
L’animateur Mathieu Beaumont remplacera M. Dutrizac jusqu’à la mi-août alors qu’une nouvelle émission sera présentée pour prendre la plage horaire occupée par « Dutrizac ».
PUBLIÉ LE MERCREDI 31 MAI 2017 À 19 H 12 | Mis à jour à 0 h 05
Le Québec a décidé de relancer le débat constitutionnel, selon ce qu'a appris La Presse canadienne.
La Presse canadienne
Bien déterminé à voir sa différence enfin reconnue officiellement d'un océan à l'autre, le Québec va lancer une vaste offensive à travers le pays pour convaincre les Canadiens de la justesse de ses revendications.
Le gouvernement Couillard cherche ainsi à créer les conditions favorables à la reprise d'éventuelles négociations constitutionnelles, le moment venu. À terme, si le Québec obtient la reconnaissance souhaitée, il pourrait donc adhérer à la Loi constitutionnelle de 1982 et ainsi faire partie officiellement de la grande famille canadienne.
L'approche privilégiée est essentiellement pédagogique. Pas de couteau sur la gorge. Aucune échéance fixée. On veut surtout communiquer, convaincre, expliquer.
Pour y arriver, le gouvernement Couillard a choisi de fondre la délicate et complexe question constitutionnelle dans une redéfinition plus vaste des relations entre le Québec et le Canada.
Le premier ministre Philippe Couillard aura mis quelques années à étayer sa pensée sur le sujet, préciser son argumentaire et rédiger une brique de près de 200 pages, un texte fondateur décrivant dans le détail la position de son gouvernement sur la place du Québec au sein du Canada.
Ce document, dont La Presse canadienne a obtenu copie, est intitulé Québécois, c'est notre façon d'être Canadiens et constitue la toute première politique du gouvernement Couillard « d'affirmation du Québec et des relations canadiennes ».
En devenant chef du Parti libéral du Québec, en 2013, M. Couillard, fédéraliste convaincu, s'était engagé à reprendre les « discussions » constitutionnelles avec le Canada, dans le but de voir le Québec « réintégrer la famille canadienne ». Mais depuis qu'il est premier ministre, le dossier avait été mis de côté. Ce sera bientôt chose du passé, car le premier ministre doit rendre public le document dans les prochains jours, à l'occasion d'une déclaration solennelle.
Avant tout, Québec souhaite faire sauter le « tabou » qui entoure tout le débat constitutionnel, depuis l'échec du référendum d'octobre 1995, car « le Québec et le Canada semblent prêts pour un changement de paradigme » à ce sujet.
Le Québec cherche à obtenir du Canada la reconnaissance formelle de la nation québécoise, de son identité propre, un geste politique qui, peut-on lire dans le document, ferait en sorte « que les Québécois ne se sentiraient plus exilés au sein de leur propre pays ».
En fait, Québec souhaite faire d'une pierre deux coups : afficher et expliquer sa position constitutionnelle en vue d'éventuelles négociations, mais aussi, dans une perspective plus large, établir des relations beaucoup plus étroites entre le Québec et le reste du Canada à l'avenir, sur tous les plans. Car le Québec, plus que jamais, veut prendre sa place dans la fédération, être de tous les forums, faire entendre sa voix, dire qui il est, ce qu'il veut. Et espérer être accepté tel qu'il est, pour que sa différence soit un jour enchâssée officiellement dans la Constitution canadienne.
Mêmes revendications, autre approche
Dans le document, lancé à l'occasion des célébrations entourant le 150e anniversaire de la fédération canadienne, le gouvernement Couillard reprend à son compte toutes les revendications traditionnelles du Québec et s'approprie, en les actualisant, les fameuses cinq conditions préalables fixées par le gouvernement de Robert Bourassa en 1986 :
reconnaissance du Québec comme société distincte;
limites au pouvoir fédéral de dépenser;
garantie d'une représentation québécoise à la Cour suprême;
droit de veto sur les modifications constitutionnelles;
et pouvoirs accrus en matière d'immigration.
« Si le contexte politique et constitutionnel a beaucoup changé depuis leur formulation, elles [les cinq conditions] demeurent une illustration concrète des garanties constitutionnelles qui doivent découler d'une reconnaissance adéquate de la Nation québécoise », estime le premier ministre Couillard, 30 ans plus tard.
Les revendications sont intactes, mais l'approche politique, elle, a bien changé. À la stratégie passée du couteau sur la gorge, en vogue depuis les années 1970, le gouvernement Couillard opposera donc une main tendue. Loin des rapports de force qui ont jalonné les relations Québec-Ottawa en ce domaine depuis des décennies, son approche sera essentiellement pédagogique, axée sur le dialogue et la persuasion, destinée à « nous faire mieux comprendre » du reste du pays. Bref, on veut préparer le terrain.
Conformément à cette ambiance bon enfant, cet esprit d'échange et d'écoute mutuelle, pas question que le Québec s'impose ou impose à ses homologues d'échéancier précis.
Dialoguer, puis négocier
L'important, aux yeux de Québec : retrouver l'esprit d'ouverture à la diversité qui prévalait à l'origine de la fédération, à l'époque des deux peuples fondateurs. « Il faut donc travailler à rétablir ce que les Québécois ont toujours voulu depuis 1867, soit un Canada qui les accepte pour ce qu'ils sont », peut-on lire dans le document, rédigé par plusieurs personnes sous la supervision du ministre responsable des Relations canadiennes, Jean-Marc Fournier.
S'il est fécond, le dialogue Québec-Canada pourrait entraîner, espère-t-on, une nouvelle ronde de négociations constitutionnelles, perçue dans ce cas-ci comme un point d'arrivée, plutôt qu'un point de départ.
Le gouvernement du Québec est toujours déterminé à ce que ses demandes soient éventuellement discutées et qu'on parvienne ensemble à une solution constitutionnelle gagnante pour l'ensemble des partenaires fédératifs.
Les discussions à venir ne seront donc pas uniquement centrées sur une « ronde Québec », mais pourraient inclure notamment les revendications des Autochtones ou aborder d'autres enjeux. Le gouvernement Couillard tient aussi à promouvoir le concept de fédéralisme asymétrique, ainsi qu'à étendre celui d'« interculturalisme », comme modèle d'intégration des immigrants au Québec.
Rétablir le lien de confiance
Le Québec ne veut plus être perçu comme la province qui fait bande à part dans la fédération. Le gouvernement Couillard veut rebâtir un lien de confiance et s'engage donc désormais à assurer une « présence soutenue » d'un bout à l'autre du pays.
Cette participation « proactive » du Québec se verra sur toutes les tribunes, dans les forums politiques, dans les milieux universitaires, auprès des groupes d'affaires et sociaux, dans les médias traditionnels et sociaux, en fait partout où la voix du Québec doit être entendue pour refléter la vision et les ambitions de son gouvernement. Surtout, on cherchera à faire la démonstration que le Québec est un partenaire actif de la mosaïque canadienne.
Le document s'adresse aux Canadiens en général, mais aussi aux Québécois en particulier. D'un couvert à l'autre, le gouvernement Couillard accorde une grande importance à la promotion de la « Nation québécoise », avec un « N » majuscule, et à la définition de l'identité québécoise, cherchant à réconcilier les Québécois avec leur double appartenance : canadienne et québécoise, deux allégeances qui s'additionnent et s'enrichissent, au lieu de s'opposer, selon lui.
En somme, une allégeance québécoise à laquelle s'additionne une appartenance canadienne représente la réalité identitaire d'une vaste majorité de Québécois.
Cette double allégeance va d'ailleurs dans les deux sens, car si, selon le gouvernement Couillard, l'identité québécoise comporte une part importante d'identité canadienne, « l'identité canadienne comporte une part importante d'identité québécoise ».
Le document adopte une perspective historique des relations Québec-Ottawa, sous l'angle du besoin toujours croissant exprimé par le Québec d'affirmer son identité nationale, d'afficher sa différence, notamment linguistique, et d'étendre ses pouvoirs. Il insiste sur le partage des compétences entre Ottawa et les provinces, et sur la nécessité de respecter scrupuleusement ce partage pour assurer le bon fonctionnement de la fédération.
Car « le partage des compétences est au coeur du compromis fédératif canadien et, plus particulièrement pour le Québec, il représente la garantie la plus importante de la pérennité et de l'épanouissement de son identité nationale. La réalité nationale du Québec entraîne en effet des responsabilités particulières de l'État québécois dans les domaines liés à son identité de même que dans les secteurs de compétence que lui reconnaît la Constitution, notamment en santé, en éducation, en matière d'affaires municipales et d'aménagement du territoire et, de façon générale, de politiques sociales ».
Changement de structure
Signe que le gouvernement Couillard prend très au sérieux son objectif de faire rayonner ses revendications constitutionnelles et ses positions politiques partout au Canada dans l'année qui vient, il va procéder à des changements dans la structure gouvernementale.
Le Secrétariat québécois des relations canadiennes (SQRC) prendra le relais du Secrétariat des affaires intergouvernementales canadiennes (SAIC), avec des unités Québec-Canada créées dans tous les ministères, pour s'assurer que chacun d'eux profite de toutes les tribunes possibles dans leur secteur d'activités à travers le pays.
Dans son document, le gouvernement Couillard a tracé les contours de l'identité québécoise :
Ce que nous sommes comme Québécois
Le Québec est libre de ses choix et capable d'assumer son destin et son développement.
Le Québec possède toutes les caractéristiques d'une nation et se reconnaît comme tel.
La Nation québécoise est composée d'une majorité francophone.
Elle est composée également d'une communauté d'expression anglaise qui dispose de droits et de prérogatives.
Elle reconnaît onze nations autochtones réparties à travers le Québec.
La Nation québécoise est forte d'une grande diversité culturelle qui s'intègre à la trame historique commune dans le cadre de l'interculturalisme.
Le modèle de l'interculturalisme développé au Québec vise à assurer l'équilibre entre, d'une part, l'ouverture à la diversité et, d'autre part, le maintien du caractère distinct et francophone du Québec.
Certains aspects primordiaux constituent l'identité propre au Québec, notamment :
un caractère unique;
le français comme langue de la majorité et comme langue officielle;
une tradition juridique civiliste;
des institutions propres en matière politique, culturelle, économique, éducative et sociale.
En bref
Philippe Couillard veut obtenir du Canada qu'il reconnaisse officiellement la différence québécoise, un geste qui ferait en sorte « que les Québécois ne se sentiraient plus exilés au sein de leur propre pays ».
« Le Québec et le Canada semblent prêts pour un changement de paradigme »
À propos des cinq conditions du Québec formulées lors de l'Accord du lac Meech (1987-1990) : « Si le contexte politique et constitutionnel a beaucoup changé depuis leur formulation, elles demeurent une illustration concrète des garanties constitutionnelles qui doivent découler d'une reconnaissance adéquate de la Nation québécoise. »