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Publié le 24 octobre 2016 à 05h00 | Mis à jour à 07h24
Guy Ouellette est député de Chomedey depuis 2007. Il a pris sa retraite de la SQ en juin 2001, après 32 ans de service pendant lesquels il a acquis une expertise pointue en matière de gangs de motards criminels.
Publié le 24 octobre 2016 à 05h00 | Mis à jour à 07h24
ARCHIVES LE SOLEIL |
CHRISTIANE DESJARDINS
La Presse
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Après avoir pris sa retraite de la Sûreté du Québec, et avant d'être élu député libéral, il est arrivé que Guy Ouellette soit rémunéré à l'aide du fonds secret de la SQ, pour témoigner en matière de motards criminels.
«Il trouvait injuste d'être rémunéré un jour ou deux, alors qu'il mettait des heures à préparer des dossiers», a raconté l'ex-directeur général de la SQ Mario Laprise, alors qu'il témoignait au procès de Jean Audette, en mai dernier.
M. Audette, ex-directeur adjoint aux enquêtes criminelles de la SQ, est accusé de fraude et d'abus de confiance, relativement à l'utilisation des «dépenses spéciales d'opération». Il s'agit d'un fonds d'environ 25 millions par année, qui permet de payer des informateurs et d'engager des dépenses de manière confidentielle, afin de mener des enquêtes délicates.
On reproche à M. Audette d'avoir signé les formulaires permettant à un policier retraité de la SQ devenu consultant (Denis Despelteau) d'être rémunéré à même ce fonds secret de la SQ. Cette méthode aurait été utilisée pour contourner un nouveau règlement interdisant à quelqu'un qui devait de l'argent au fisc d'obtenir un contrat du gouvernement. M. Despelteau, ex-officier aux ressources humaines réembauché depuis 1998 comme consultant négociateur au Comité paritaire, avait un problème de jeu, et il devait beaucoup d'argent au fisc.
Le procès de M. Audette se déroule de façon discontinue depuis l'hiver dernier. Lors de la dernière audience, en mai, alors que M. Laprise témoignait, une ordonnance de non-publication nous empêchait de révéler le nom de M. Ouellette. Cette ordonnance a été levée en juin, alors que le procès faisait relâche. Le procès de M. Audette reprend aujourd'hui, devant le juge Thierry Nadon.
Informé par un lanceur d'alerte
On sait que c'est sous le règne de Mario Laprise, qui a été directeur de la SQ d'octobre 2012 à août 2014, que l'affaire du fonds secret a été mise au jour et que quatre officiers supérieurs, dont M. Audette, ont été accusés. Dès son arrivée en poste, M. Laprise avait été informé par un lanceur d'alerte de dépenses douteuses faites au moyen du fonds secret. M. Laprise avait trouvé cela «aberrant», et il avait demandé une enquête à ce sujet au ministre de la Sécurité publique.
Ironiquement, le cabinet de juricomptables pressenti pour participer à l'enquête avait déjà été payé par le fonds secret dans le passé. M. Laprise craignait une «apparence de conflit d'intérêts», a-t-il fait valoir lors de son témoignage, en mai dernier. Il a dit ignorer si le cabinet en question avait finalement décroché le contrat.
Lors de son témoignage, M. Laprise a aussi été interrogé sur des dépenses du fonds secret qui avaient été autorisées du temps où lui-même chapeautait les enquêtes, à la SQ, soit avant 2005. Le fait que le policier retraité Guy Ouellette y apparaissait comme fournisseur a fait tiquer la défense. N'était-ce pas là la démonstration qu'un large éventail de dépenses pouvait transiter par ce canal?
M. Laprise s'est bien défendu d'avoir fait une entorse au règlement et a soutenu que c'était justifié. Il a expliqué qu'il avait demandé un avis juridique auparavant et que cet avis avait été «positif».
Et il faut «se remettre dans le contexte», a-t-il expliqué, en faisant allusion aux suites de l'opération Printemps 2001 qui visait les motards. «Il fallait protéger M. Ouellette, qui n'était plus policier, et les dossiers de la Couronne.»
«Mais il témoignait publiquement, M. Ouellette! Ce n'était pas caché! Il avait une [citation] à la Cour», a réagi Me Pierre Dupras.
Les explications de Guy Ouellette
La Presse a questionné le député Ouellette à ce sujet, il y a quelques jours. M. Ouellette a indiqué qu'il ne savait pas quels fonds servaient à le payer. «Au début, c'était la SQ qui me payait, mais je ne sais pas avec quel budget. Je n'ai pas de connaissance personnelle de ça. L'entente, c'est que pour le temps que j'investissais dans une cause, je détaillais mes heures. À un moment donné, ça a été transféré au ministère de la Justice, et c'est eux qui défrayaient mes témoignages d'expert», a-t-il dit.
M. Ouellette précise qu'il témoignait en qualité d'expert. «Les témoignages d'experts, c'est reconnu par les tribunaux. Je pense même que j'étais en dessous du taux horaire de base. Un témoignage d'expert, ce n'est pas comme un témoignage factuel de cause. La préparation est beaucoup plus longue», a-t-il dit.
M. Ouellette a pris sa retraite de la SQ en juin 2001, après 32 ans de service. Il avait acquis une expertise pointue en matière de gangs de motards criminels. Il dit avoir témoigné 92 fois à travers le Canada, particulièrement après l'opération Printemps 2001.
«La Sûreté avait un besoin. Il y a eu une entente, et après on m'a demandé de faire de la facturation, un état détaillé de ce que je rendais comme témoignage. À l'époque, j'étais tout seul comme expert, et j'ai l'impression que c'est encore pas mal comme ça» a-t-il dit.
***
Qui sont-ils?
Guy Ouellette > M. Ouellette a été élu député de Chomedey en 2007, et il l'est encore aujourd'hui. Il n'exclut pas la possibilité de témoigner à nouveau comme expert, si jamais il lui arrivait de faire autre chose que de la politique.
Denis Despelteau > Denis Despelteau, directeur adjoint aux ressources humaines, a pris sa retraite en 1998 de la SQ et est devenu consultant. Il était négociateur pour le Comité paritaire. Il a reçu 233 000 $ du fonds secret pour le travail qu'il a effectué en 2011 et 2012. De son propre aveu, son salaire a été haussé de 50 % (150 $ l'heure au lieu de 100 $), quand il a été rémunéré par le fonds secret. Lui-même accusé, dans la foulée de cette affaire, il a plaidé coupable à des accusations de fabrication de faux et abus de confiance et a écopé d'une peine de 15 mois à purger dans la collectivité.
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