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samedi, juin 20, 2015

Sondage CROP: l'effet Duceppe, la vague Mulcair

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Publié le 20 juin 2015 à 05h00 | Mis à jour à 05h00
Le retour de Gilles Duceppe (à gauche) à... (Photothèque Le Soleil)
PHOTOTHÈQUE LE SOLEIL

Le retour de Gilles Duceppe (à gauche) à la tête du Bloc québécois en remplacement de Mario Beaulieu donne un nouveau souffle à la formation souverainiste, selon un sondage.

<p>Michel Corbeil</p>
MICHEL CORBEIL
Le Soleil
(Québec) Le retour de Gilles Duceppe a revigoré le Bloc québécois de façon spectaculaire. Mais Thomas Mulcair et le Nouveau Parti démocratique (NPD) sont toujours bons premiers au Québec dans les intentions de vote pour le prochain scrutin fédéral.
Le retour de Gilles Duceppe a revigoré le... (Infographie Le Soleil) - image 1.0
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Le sondage conduit par la firme CROP note que la décision de ramener M. Duceppe comme chef de la formation souverainiste travaillant à Ottawa a généré une hausse importante du soutien populaire.
À quelques mois des élections générales, le bond du Bloc est rien de moins que de 12 points de pourcentage. Sous Mario Beaulieu, c'était la catastrophe électorale annoncée, et les bloquistes se seraient contentés de 13 % des voix, si l'appel au peuple était tombé en mai. Le sondage, conduit en juin, au lendemain de l'annonce du retour de Gilles Duceppe, amène ce soutien à 25 %, après répartition des indécis.
CROP donne cependant toujours la position de tête au NPD. L'appui aux néo-démocrates a reculé de six points, mais le NPD a la faveur de 36 % des Québécois. Les libéraux de Justin Trudeau sont en chute libre. À 22 %, ils sont derrière le Bloc. C'est la débandade : en décembre, ils étaient à 37 %. «Les mauvais sondages entraînent les mauvaises nouvelles qui entraînent les mauvais sondages», laisse entendre le vice-président de CROP, Youri Rivest.
Le Parti conservateur du Canada de Stephen Harper reste marginal dans l'opinion publique québécoise. À 14 %, il ne peut rêver qu'à l'élection de quelques députés, probablement dans la région de Québec, où se concentre son électorat.
Les verts stagnent (3 %). Il n'est pas impossible qu'un «microclimat» dans une circonscription permette d'élire une des personnalités connues qui se présentent, admet M. Rivest. Mais cela demeure hautement improbable avec un si faible soutien.
Près de «la zone payante»
Le redressement du Bloc québécois est remarquable, note M. Rivest. Il croit que M. Duceppe est responsable à lui seul de l'ajout de sept ou huit points de pourcentage. Mais, pour l'instant, cela se limite à permettre à la formation de passer de «parti marginal» au statut de parti «compétitif» qui peut être «dans la course».
En fait, lors du scrutin de 2011, le Bloc n'a fait élire que quatre candidats après avoir reçu 23,4 % des voix. Youri Rivest juge que le parti de M. Duceppe est «sur le fil du rasoir. Cela lui en prend juste un peu plus» avant de pénétrer «dans la zone payante», en termes de sièges au Parlement.
Devant lui se dressent des écueils, analyse l'expert. Composé d'électeurs «moins scolarisés, moins politisés», [...] l'appui du Bloc est moins solide. Le problème du Bloc, c'est qu'ils sont deuxièmes, au mieux, dans toutes les régions» où il y a beaucoup de sièges à l'enjeu, sauf à Québec, où ils sont troisièmes. C'est le cas chez les francophones. Le Bloc reçoit 30 % des appuis, derrière le NPD qui en a 38 %.
En cette période de précampagne électorale, les troupes de Thomas Mulcair sont en bonne position. Outre la première place dans les intentions de vote, c'est aussi le parti qui est cité le plus souvent comme un deuxième choix, relève CROP dans son enquête.
Il se trouve là une «possibilité de croissance» des appuis de l'électorat, analyse Youri Rivest. D'autant que Thomas Mulcair égale la performance de sa formation lorsque les électeurs se font demander qui est la meilleure personne pour occuper le fauteuil de premier ministre : 36 % estiment que c'est le néo-démocrate.
À cet égard, le chef conservateur Stephen Harper n'est endossé que par 12 % des Québécois. Le libéral Justin Trudeau fait un peu mieux, avec 17 % des électeurs qui le voient à la tête du gouvernement fédéral.
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La CAQ en chute libre

Au Québec, la lutte politique pour obtenir la faveur populaire se joue à deux - entre les péquistes et les libéraux -, une course où la Coalition avenir Québec (CAQ) de François Legault semble se faire larguer.
Une enquête d'opinion réalisée par CROP indique que le Parti québécois est à égalité avec le Parti libéral. Chacun aurait récolté 34 % des suffrages si le scrutin s'était tenu entre le 11 et le 16 juin.
Par rapport au coup de sonde de mai, le Parti québécois (PQ) de Pierre Karl Péladeau a progressé d'un point de pourcentage. Le Parti libéral du Québec (PLQ) de Philippe Couillard, lui, a fait un bond de cinq points. Il y a un mois, le PQ était seul en tête.
La firme de sondage estime que M. Péladeau aurait été placé à la tête d'un gouvernement, peut-être même majoritaire, en raison de la position dominante de sa formation chez les francophones. 
La Coalition avenir Québec sort perdante, en baisse de trois points dans le sondage. Le parti qu'a fondé François Legault est tombé sous la barre des 20 %, précisément à 17 %. En septembre dernier, lorsque le PQ était sans chef, la CAQ était pourtant le choix de 30 % des Québécois. Québec solidaire reste loin des meneurs, avec 13 % du soutien populaire.
Dans l'électorat francophone, la clé pour prendre le pouvoir à l'Assemblée nationale, les péquistes jouissent d'une confortable avance avec l'appui de 41 % des personnes sondées. Le PLQ suit à 25 %; la CAQ, à 19 %; et les solidaires, à 13 %.
Selon l'expert sondeur Youri Rivest, il est tôt pour juger de la performance réelle de M. Péladeau, qui vient d'accéder à la barre du PQ. Il faut compter deux ou trois mois pour que l'effet «lune de miel», dont bénéficie un nouveau leader, s'estompe et fasse place à des bases plus solides, rappelle-t-il.
Selon son analyse, il n'y a cependant pas de «Péladeau manie» à l'horizon. «Ce qui est une bonne nouvelle pour lui, avance le vice-président de CROP. C'est plus réaliste, plus solide que juste un effet de popularité.» Selon le sondage, M. Péladeau «ne laisse personne indifférent», signale au passage le sondeur.
Austérité pas si nuisible
L'enquête d'opinion est loin d'être un désastre pour les libéraux. «La satisfaction à l'endroit du gouvernement n'est pas très élevée [35 %], mais ce n'est pas non plus la grogne», commente Youri Rivest. Ce chiffre correspond à la «base électorale» qui a voté pour le PLQ, en 2014, fait-il remarquer.
Et le climat de restrictions budgétaires et de morosité «les affecte, mais pas tant que ça», ajoute-t-il.
«Ce sont les caquistes que je trouve les plus mal pris», poursuit le sondeur. La CAQ peut tirer son épingle du jeu dans le débat économique ou même identitaire. C'est beaucoup plus difficile lorsque l'enjeu devient une opposition entre fédéralistes et souverainistes. Notons que CROP signale que 40 % des Québécois auraient voté en faveur de l'indépendance, ce qui situe le score dans le haut du «corridor d'appuis».
L'arrivée de M. Péladeau comme chef a «exacerbé la polarisation autour de la question référendaire», affirme M. Rivest. «C'est de cela dont pâtit la CAQ, dit-il. Si on est dans les Oui au référendum et dans les Non, la Coalition ne sert pas à grand-chose. Dans un autre débat, plus "gauche/droite", elle devient plus pertinente.»
Il n'est pourtant pas certain que la population veuille vraiment de ce débat, croit M. Rivest. «C'est mon point d'interrogation.» La réponse pourrait venir d'Ottawa, à l'occasion du scrutin prévu en octobre. «Si le Bloc québécois ne performe pas, on dira qu'il n'y a pas cette polarité dans l'opinion publique.»
François Legault est parti pour la pause estivale à la suite d'une défaite durement ressentie dans Chauveau. «L'histoire racontée par le sondage, c'est qu'ils ont perdu l'élection partielle, souligne Youri Rivest. Gagner, cela fait monter dans les sondages. Perdre, ça fait descendre. Il y a un effet d'entraînement.»

La capitale «bleue» à Ottawa, «rouge» à Québec

Les citoyens de la grande région de Québec continuent de se démarquer des réflexes politiques du reste de l'électorat de la province.
Selon l'enquête d'opinion de CROP, il n'y a que dans la capitale que le Parti conservateur du Canada est en tête des intentions de vote. Du côté provincial, il n'y a qu'ici que le Parti libéral du Québec domine largement.
Si des élections avaient eu lieu du 11 au 16 juin, les candidats de Stephen Harper auraient obtenu 33 % des suffrages dans la capitale. C'est une courte avance sur le Nouveau Parti démocratique à qui CROP accorde 31 % du soutien populaire. Le Bloc québécois récolte un maigre 21 %; le Parti libéral du Canada est relégué à un rôle de figuration (13 %); le Parti vert est invisible (2 %).
Pour ce qui est de lorgner un fauteuil à l'Assemblée nationale, dans la région de Québec, où les francophones sont largement majoritaires, les libéraux de Philippe Couillard reçoivent l'endossement de 43 % des personnes interrogées pour l'enquête d'opinion. La Coalition avenir Québec de François Legault s'accroche de peine et de misère à la seconde place (27 %), à peine quatre points devant le Parti québécois de Pierre Karl Péladeau. Québec solidaire demeure marginal (6 %).
CROP précise toujours que l'échantillonnage réduit rend plus incertaines les projections de vote régionales. Cependant, après plusieurs coups de sonde, des tendances peuvent se dégager.

Méthodologie

CROP a conduit son enquête du 11 juin au 16 juin au moyen d'un panel Web. Mille questionnaires ont été remplis. Compte tenu du caractère non probabiliste de l'échantillon, explique la firme de sondage, le calcul de la marge d'erreur ne s'applique pas.