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dimanche, juillet 31, 2016

France: les musulmans manifestent leur horreur du djihadisme

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Publié le 31 juillet 2016 à 07h38 | Mis à jour à 07h38
Plus d'une centaine de musulmans étaient dans la... (PHOTO CHARLY TRIBALLEAU, AGENCE FRANCE-PRESSE)
PHOTO CHARLY TRIBALLEAU, AGENCE FRANCE-PRESSE
Plus d'une centaine de musulmans étaient dans la matinée dans la cathédrale de Rouen.

HERVÉ LIONNET
Agence France-Presse
Rouen
Cinq jours après l'assassinat d'un prêtre qui a bouleversé la France, de nombreux musulmans ont manifesté dimanche leur horreur du djihadisme, présents aux messes aux côtés des catholiques ou par des tribunes dans les médias.
Ils étaient ainsi plus d'une centaine dans la matinée dans la cathédrale de Rouen, mêlés à la foule des quelque 2000 fidèles qui se pressaient pour une messe d'hommage au père Jacques Hamel, le prêtre de 85 ans égorgé mardi dans l'église de Saint-Etienne-du-Rouvray par deux jeunes de 19 ans se réclamant de l'organisation État islamique (EI).
«Amour pour tous, haine pour personne», pouvait-on lire sur une affiche accrochée à l'intérieur de l'édifice par une association musulmane.
La présence des musulmans est «un geste courageux», «un geste de paix», a souligné l'archevêque de Rouen, Mgr Dominique Lebrun. «Vous affirmez ainsi que vous refusez les morts et les violences au nom de Dieu. Comme nous l'avons entendu de vos bouches que nous savons sincères, ce n'est pas l'islam», a-t-il souligné.
À Bordeaux, l'imam de la mosquée, Tareq Oubrou, s'est rendu à l'église Notre-Dame accompagné d'une délégation d'une dizaine de fidèles, hommes, femmes et enfants.
À Nice, endeuillé par un attentat lui aussi revendiqué par l'EI qui a fait le 14 juillet 84 morts et 435 blessés, dont de nombreux musulmans, l'église Saint-Pierre-de-l'Ariane a recu la visite de l'imam Otman Aissaoui et d'un groupe de fidèles. «Être uni est une réponse à ces actes d'horreur et de barbarie», a souligné le religieux.
Tous répondaient à un appel inédit du Conseil français du culte musulman, qui a aussi été relayé en Italie où, de Milan au nord à Palerme au bout de la Sicile, de petites délégations d'imams, de responsables et de fidèles se sont rendues dans les églises.
Cette initiative rompt avec une certaine frilosité des musulmans pratiquants à s'exprimer dans l'espace public. Après les attentats contre l'hebdomadaire satirique Charlie Hebdo, des policiers et un magasin casher (17 morts), leur faible présence à la manifestation monstre du 11 janvier 2015 leur avait été reprochée.
«Bataille culturelle»
«Nous devons répondre à l'interpellation de la société française qui nous dit «mais qui êtes vous? Que faites-vous?», ont lancé une quarantaine d'entre eux dans une tribune publiée par leJournal du Dimanche, en rappelant qu'«aujourd'hui les musulmans de France sont à 75% français» et doivent prendre toute leur place dans la société.
Médecins, universitaires, chefs d'entreprise, artistes, «musulmans de foi et de culture», ils ont appelé à «mener enfin la bataille culturelle contre l'islam radical» qui séduit une frange de la jeunesse, alors que «le risque de fracture entre les Français est chaque jour plus important».
Ils ont souligné la nécessité de réorganiser l'islam de France «qui n'a aucune prise sur les évènements», une préoccupation qui rejoint celle du premier ministre Manuel Valls.
Dans le même journal, il estime que si «l'islam a trouvé sa place dans la République», il y a «urgence» à «bâtir un véritable pacte» avec cette religion, la deuxième en France.
Selon M. Valls, il faudrait «revoir certaines règles pour tarir les financements extérieurs» du culte musulman «et accroître en compensation les possibilités de collectes de fonds» en France.
Dans un précédent entretien au quotidien Le Monde, le premier ministre souhaitait notamment «que les imams soient formés en France et pas ailleurs».
L'enquête, quant à elle, a permis d'établir que les deux assassins du prêtre, Abdel Malik Petitjean et Adel Kermiche, se sont rencontrés via le système de messagerie chiffrée Telegram quelques jours seulement avant leur passage à l'acte, selon plusieurs médias. Adel Kermiche y aurait décrit par avance le mode opératoire de l'attentat, mentionnant «un couteau» et «une église».
Les deux jeunes avaient été repérés chacun de leur côté par les services antiterroristes sans que leur projet ait été détecté. Kermiche, qui était inculpé pour avoir tenté de partir en Syrie, était sous surveillance électronique dans l'attente de son procès.
Dans une interview à l'hebdomadaire La Vie, les deux religieuses prises en otages dans l'église de Saint-Etienne-du-Rouvray (une troisième a pu fuir pour donner l'alerte) ont raconté qu'un dialogue s'était engagé avec les deux jihadistes après l'assassinat du prêtre. «Tant qu'il y aura des bombes sur la Syrie, nous continuerons les attentats», leur a dit l'un des deux hommes.