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jeudi, décembre 10, 2015

La loi sur l'aide médicale à mourir est en vigueur aujourd'hui

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Publié par La Presse Canadienne le mercredi 09 décembre 2015 à 21h29. Modifié par Charles Payette le jeudi 10 décembre 2015
La loi sur l'aide médicale à mourir est en vigueur aujourd'hui
MONTRÉAL - La Loi sur les soins de fin de vie entre finalement en vigueur, aujourd'hui, comme prévu. Le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, l'a annoncé mercredi après que la Cour d'appel eut accepté, plus tôt en journée, d'entendre l'appel du gouvernement du Québec.
Cet appel conteste la décision de la Cour supérieure qui a suspendu, la semaine dernière, les articles portant sur l'aide médicale à mourir.
«Nous nous retrouvons dans une situation qui est celle qui a été voulue par la population à la suite d'un long débat, a déclaré le ministre Barrette. Le Québec a débattu pendant plusieurs années et un consensus s'en est tiré.»

M. Barrette a cependant rappelé que l'objectif premier de la loi était d'offrir des soins palliatifs et que l'aide médicale à mourir ne serait pas offerte sans qu'un processus d'encadrement très mûrement réfléchi ait été suivi.

Il a aussi souligné que même si la loi entrait en vigueur jeudi, la Cour d'appel avait toujours à trancher sur le fond de la question et que son gouvernement se plierait à toute décision éventuelle du tribunal.

Dans un communiqué transmis en fin de journée, la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, a tenu à rassurer les médecins qui craignent de faire l'objet de poursuites criminelles s'ils appliquent les dispositions de la loi.

«Nous tenons à les informer que nous allons transmettre une orientation à la directrice des poursuites criminelles et pénales. Cette orientation vise à permettre aux personnes en fin de vie de recevoir des soins respectueux de leur dignité et de leur autonomie par l'accès à l'aide médicale à mourir dès l'entrée en vigueur de la loi », a déclaré Mme Vallée.

La députée péquiste Véronique Hivon, qui a porté le projet depuis le tout début, s'est fortement réjouie de la décision du tribunal.

Le juge Robert Mainville a mis moins de trois heures, mercredi, à rendre une décision, reconnaissant que «l'appel doit être entendu de façon urgente», tout en rappelant que la permission d'en appeler ne devait pas être interprétée comme un désaveu du jugement de première instance. L'appel sera donc entendu sur le fond dès le 18 décembre par un banc de trois juges.

Sa décision permettrait l'entrée en vigueur de la loi dès jeudi, comme prévu, puisque le juge a «ordonné la suspension des procédures en première instance jusqu'au jugement de la Cour d'appel». Ces procédures étaient justement celles qui empêchaient la mise en oeuvre des articles de la loi qui permettent l'aide médicale à mourir.

Toutefois, contrairement au gouvernement du Québec, un avocat au coeur de la demande d'injonction en Cour supérieure n'y voit pas de permission de mettre en oeuvre la loi. Dans un communiqué transmis par courriel, mercredi, Me Gérard Samet ne semble cependant pas manifester l'intention de contester cette interprétation devant les tribunaux.

Le juge Mainville fait valoir dans sa décision qu'un jugement est sujet à appel s'il a pour effet de créer une situation à laquelle le jugement final ne pourra remédier. Or, le magistrat note que les personnes en fin de vie ne pouvaient se prévaloir de l'aide médicale à mourir lors de l'entrée en vigueur prévue de la loi, jeudi, et qu'il s'agissait dès lors, «à ne pas en douter, d'une chose à laquelle le jugement final ne pourra remédier».

Le gouvernement du Québec avait fait valoir que la Cour supérieure avait erré en suspendant certains articles de la loi sans entendre les arguments de fond du dossier.

Le juge Michel Pinsonnault avait estimé que certains articles de la loi québécoise étaient en contradiction avec ceux du Code criminel qui interdit l'aide au suicide.

Le procureur du gouvernement, Me Jean-Yves Bernard, avait fait valoir que toutes les précautions ont été prises dans la rédaction de la loi québécoise pour éviter cette contradiction.

Il soutenait que les tribunaux devaient «présumer que la loi est à l'avantage du public» et que «les deux lois sont compatibles». Selon lui, «c'est à celui qui le conteste de démontrer que ce n'est pas le cas», une démonstration qui n'avait pas été faite dans ce cas-ci puisque le juge Pinsonnault n'avait pas entendu les arguments de fond.

La Coalition des médecins pour la justice sociale et Lisa D'Amico, qui étaient derrière la demande d'injonction, estimaient au contraire que le juge Pinsonnault avait eu raison de souligner une contradiction puisque la loi permet à un médecin de provoquer intentionnellement la mort, une infraction claire au Code criminel.

L'avocat de Mme D'Amico, Me Gérard Samet, avait reproché au gouvernement du Québec d'être trop pressé d'aller de l'avant, alors que la Cour suprême a donné au gouvernement fédéral jusqu'en février prochain pour éclaircir ce dossier.

Le plus haut tribunal du pays a invalidé, en février dernier, les articles du Code criminel interdisant l'aide médicale à mourir et a accordé au fédéral 12 mois pour rédiger une nouvelle loi reconnaissant le droit aux adultes consentants subissant des souffrances mentales ou physiques intolérables de réclamer une aide médicale pour mettre fin à leurs jours.

L'avocat de la Coalition, Me Dominique Talarico, avait de son côté rappelé que la santé est un domaine de compétence partagée entre le fédéral et les provinces et que le Québec doit donc attendre de voir si Ottawa produira une législation pancanadienne, comme c'est le cas de l'universalité, par exemple.

La loi, qui précise les exigences à respecter avant qu'un médecin puisse administrer une aide médicale à mourir, a été adoptée à l'Assemblée nationale en juin 2014.