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dimanche, novembre 08, 2015

GÉNIE-CONSEIL L’industrie montre patte blanche en attendant Charbonneau

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7 novembre 2015 |Guillaume Bourgault-Côté | Québec
Le rapport de la commission Charbonneau distribuera certainement des blâmes à des firmes membres de l’Association des firmes de génie-conseil du Québec.
Photo: Graham Hughes La Presse canadienne

Le rapport de la commission Charbonneau distribuera certainement des blâmes à des firmes membres de l’Association des firmes de génie-conseil du Québec.
Nouvelles normes d’éthique et d’intégrité, nouvelle gouvernance, nouveau nom… et tournée médiatique pour mettre ces changements de l’avant : à quelques semaines du dépôt du rapport de la commission Charbonneau, l’Association des firmes de génie-conseil du Québec (AFG) veut montrer patte blanche et assure que l’industrie a changé.
 
C’est une « tempête presque apocalyptique » qui s’est abattue sur le génie-conseil depuis quatre ans, reconnaissait jeudi le p.-d.g. de l’association, André Rainville, lors d’une entrevue éditoriale avec Le Devoir« Nous avions le vent dans les voiles, puis le vent s’est transformé en tourbillon… Ça a été difficile. La réputation de l’industrie a été sérieusement entachée par des gestes indéfendables. »
 
Les nombreuses révélations des enquêtes journalistiques et de la commission Charbonneau ont provoqué une crise de confiance qui est aussi survenue dans un contexte économique« défavorable », dit M. Rainville. Résultat combiné : « On a subi une baisse des activités qui a mené à une diminution sévère des emplois. »
 
Ils étaient environ 23 000 à travailler pour les firmes québécoises de génie-conseil en 2012 : ils sont aujourd’hui 18 000, calcule l’AFG. Une diminution de 20 % qui témoigne des secousses subies par le génie-conseil au Québec.
 
Blâmes
 
Le rapport de la commission Charbonneau distribuera certainement des blâmes à des firmes membres de l’AFG (36 au total, dont toutes les grandes firmes sauf Groupe SMi et Aecom) : la nouvelle direction de l’association le « présume ». Mais André Rainville soutient que l’AFG et ses membres ont déjà fait le ménage nécessaire pour tourner la page et relancer l’industrie.
 
« Les leçons ont été apprises, des mesures ont été prises, dit-il. La remise en question a été complète. » Il y a eu des décisions symboliques — comme changer le nom de l’Association des ingénieurs-conseils du Québec en AFG —, d’autres plus structurelles. Ainsi le conseil d’administration de l’association n’est-il plus noyauté par des représentants des grandes firmes, fait notamment valoir M. Rainville.
 
Sur douze membres, neuf proviennent toujours des firmes de génie-conseil, mais cinq de ces postes sont réservés aux petites firmes (500employés et moins). Deux autres postes sont pourvus par des gens indépendants « qui ont un regard neutre qui n’est pas biaisé par l’industrie », selon M. Rainville. Un dernier siège est réservé à un délégué du Forum des jeunes professionnels de l’AFG.
 
Les firmes québécoises aimeraient aussi faire de l’intégrité de leurs pratiques une carte de visite internationale, soutient André Rainville. « Les normes sont de plus en plus sévères à travers le monde. Avoir un code d’éthique solide, avoir la certification de l’Autorité des marchés financiers, répondre aux mesures mises en place par Québec, tout cela peut devenir un avantage concurrentiel. »
 
Passeport entreprise
 
En ce sens, l’AFG accueille favorablement la mise en place prochaine par Québec d’un « passeport entreprise » (une série de mesures pour donner aux entreprises, notamment les PME, un meilleur accès aux contrats de l’État) et la création d’un poste de commissaire aux contrats publics. Le président du Conseil du trésor, Martin Coiteux, a fait l’annonce de ces initiatives la semaine dernière.
 
« Ces deux mesures répondent à des recommandations qu’on a faites à la commission Charbonneau », relève M. Rainville. Cette semaine, la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante et la Corporation des entrepreneurs généraux du Québec ont aussi salué l’initiative de Québec. Les entrepreneurs y voient l’occasion de « corriger plusieurs omissions de la Loi sur les contrats des organismes publics ».

Financement: Dessau règle avec Ottawa
L’ancien vice-président de Dessau l’avait brièvement évoqué à la commission Charbonneau en 2013 : le financement illégal des partis politiques par des firmes de génie-conseil ne se limitait pas à l’ordre provincial. Le mandat de la commission ne s’étendait toutefois pas au fédéral, ce qui n’a pas permis d’approfondir ce volet.

Mais le dossier est revenu dans l’actualité vendredi, le commissaire aux élections fédérales annonçant que la firme Dessau inc. avait conclu une entente pour des gestes illégaux posés entre 2005 et 2008 par un« individu maintenant décédé ». Un stratagème de prête-noms avait été mis en place et avait permis de récolter quelque 40 000 $ au profit des libéraux et des conservateurs.

Les sommes ont été remboursées par les partis, et Dessau s’en tire sans amende, ayant reconnu les faits et accepté différentes conditions imposées par le commissaire.