Annonce

samedi, octobre 17, 2015

États-Unis: les femmes gagnent encore moins

http://fr.canoe.ca/infos/international/archives/

États-Unis: les femmes gagnent encore moins
Photo Fotolia

Ivan Couronne

WASHINGTON - Les salariées américaines ont gagné 21 % de moins que les hommes l'an dernier. La discrimination joue un rôle mais probablement de façon limitée, contrairement aux idées reçues. Pour les économistes, les plus grandes barrières à l'égalité salariale sont moins évidentes.
L'écart entre ce que gagnent les femmes et les hommes qui travaillent à plein temps n'a cessé de chuter depuis 30 ans, mais sans jamais disparaître. C'est la preuve, pour le parti démocrate, que la loi ne va pas assez loin pour mettre les salariées à égalité avec leurs collègues masculins.
Ce débat est permanent aux États-Unis.
Dans la Silicon Valley, des femmes dénoncent un climat sexiste où seuls les hommes seraient promus. Le président américain Barack Obama évoque souvent l'avenir de ses deux filles. Pour quatre Américains sur dix, la question de l'égalité salariale est le problème principal pour les femmes au travail.

COMPARER À TRAVAIL ÉGAL

En 2014, en moyenne, les femmes ont gagné 79 % du salaire des hommes, selon une étude annuelle du Census bureau (recensement) parue en septembre, soit un écart de 21 %.
Mais les chercheurs sont formels: une fois prises en compte des variables telles que l'expérience, le niveau d'éducation, le poste et le secteur d'occupation, l'écart tombe à 9 %, selon la professeure Francine Blau, spécialiste du sujet. Une étude descend jusqu'à 5 %.
Si les hommes gagnent plus, dit-elle, ce n'est plus parce qu'ils sont mieux diplômés: davantage de femmes que d'hommes sortent des universités. C'est d'abord parce qu'ils monopolisent des professions mieux rémunérées, comme avocats et ouvriers qualifiés, alors qu'enseignants et infirmières sont des professions historiquement féminines.
«Le chiffre de 79 % induit un peu en erreur. C'est un chiffre important, car il résume la différence entre hommes et femmes sur le marché du travail. Mais ce n'est pas pour un travail égal», dit à l'AFP Francine Blau, de l'Université Cornell. La discrimination joue probablement un rôle dans l'écart inexpliqué, mais il est difficilement quantifiable.
Certains militants arguent que l'écart réel, même inférieur à 20 %, reste conséquent: «des centaines de milliers de dollars sur toute une vie», calcule Vicki Shabo, vice-présidente du National Partnership for Women and Families.
«Ça m'énerve un peu quand les gens viennent me dire, oh, c'est seulement 7 ou 10 %», dit Lisa Maatz, vice-présidente de l'American Association of University Women. «Pour les gens qui tentent de joindre les deux bouts, 10 % c'est énorme».
Mais les démocrates ne font pas dans la nuance et disent souvent que les employeurs paient leurs employées sciemment moins que les hommes assis dans le même bureau.
«Il est impensable que les femmes gagnent 78 cents pour chaque dollar gagné par les hommes qui font le même travail», a dit en mai dernier Bernie Sanders, candidat aux primaires présidentielles démocrates.
«Si deux personnes font le même travail, elles doivent être payées pareil», martèle Barack Obama.
En quête du vote féminin, les démocrates n'ont pas de mots assez durs contre les républicains, qui bloquent au Congrès une loi renforçant la législation fédérale anti-discrimination.

GARDE D'ENFANTS

La Californie, dirigée par les démocrates, vient de durcir sa législation sur ce modèle. La charge de la preuve y est désormais renversée: en cas de plainte, ce seront les employeurs qui devront prouver qu'ils ne discriminent pas.
Mais les conservateurs et les économistes craignent que ce type de loi ne détourne l'attention de solutions qui pourraient mieux promouvoir l'accès des femmes aux professions hautement rémunérées.
«On ne peut pas tenir l'employeur responsable de normes culturelles sur lesquelles il n'a aucun contrôle», dit Andrew Biggs, économiste au centre de réflexion conservateur American Enterprise Institute. Il ne faut pas confondre discrimination et choix individuels de carrière, dit-il.
Francine Blau souligne que les femmes ont tendance à éviter les secteurs très compétitifs. Il est plus mal vu, pour une femme, de négocier son salaire. Surtout, les femmes sont plus souvent chargées de s'occuper des enfants, et évitent les entreprises qui n'offrent pas de flexibilité horaire ou de télétravail.
Pour aider les femmes à intégrer certaines carrières, l'une des réformes les plus efficaces pourrait être de tout simplement faciliter la garde d'enfants, dont le coût est élevé aux États-Unis - alors que l'école publique ne commence qu'à cinq ans.
AUSSI SUR CANOE.CA