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samedi, juin 13, 2015

L’entente du 12 juin: 20 ans déjà

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L’entente du 12 juin: 20 ans déjà
PHOTO REUTERS

Mario Dumont
Ce fut sans doute la signature la plus lourde de sens de ma vie. Après mon contrat de mariage bien sûr. Le 12 juin 1995, je paraphais aux côtés de Jacques Parizeau et Lucien Bouchard le texte d’un accord qui mettait en branle le processus menant au référendum sur l’avenir du Québec.
Cette entente signée en grande pompe représentait l’aboutissement de plusieurs semaines d’intenses négociations.
Réussir l’entente
Représentant différents partis, nous partions de positions différentes et nos écarts de vues allaient des grands concepts jusqu’aux sensibilités de vocabulaire. Je garde de ces discussions le souvenir d’un sentiment partagé que nous avions une responsabilité historique de réussir.
J’ai eu maintes occasions ces derniers jours de vanter le sens de l’État de monsieur Parizeau. Comme premier ministre et premier responsable de l’opération, je l’ai vu mettre l’intérêt du Québec d’abord.
Cette entente contenait les grands éléments de la démarche référendaire, le sens de la question sur laquelle les Québécois seraient consultés l’automne suivant et la proposition de nouveau partenariat à négocier avec le reste du Canada advenant un Oui. De mon point de vue, cette entente constituait la conclusion d’un chapitre fort de notre histoire: l’échec de l’Accord du lac Meech. L’échec avait une lourde portée: le refus des conditions minimales qui nous auraient permis de réintégrer la Constitution canadienne.
Dans les mois d’effervescence politique qui ont suivi, j’ai eu l’honneur de tenir la plume pour écrire le document d’orientation qui a marqué le virage nationaliste des jeunes libéraux. C’était l’époque où plusieurs rêvaient de voir le libéral Robert Bourassa réaliser la souveraineté ou au moins forcer une redéfinition du Canada.
Parole au peuple
Ensuite, comme président des jeunes libéraux, j’ai vécu la mise au rancart du rapport Allaire, et j’ai démissionné avec plusieurs au moment du référendum sur l’entente de Charlottetown.
Dans mon esprit, cet épisode crucial de notre histoire devait logiquement se conclure par une consultation du peuple sur son avenir. J’ai contribué à faire arriver cela, j’ai voulu aussi contribuer à élargir la coalition des Québécois prêts à dire Oui.
Les Québécois avaient une bonne proposition devant eux. Nous avons débattu collectivement, et la majorité a dit non. Qu’on arrête de me parler du résultat serré ou des quelques citoyennetés données à des nouveaux arrivants à la dernière minute par le fédéral. Si davantage de Québécois francophones avaient voulu la souveraineté, ce serait fait, point.
Cette semaine, deux choses m’ont frappé. Les souverainistes se disant récemment ragaillardis tentent de multiplier les stratégies astucieuses pour relancer leur projet. Le référendum de 1995 s’est enraciné dans les suites de l’échec de Meech. Même pour les pressés, les petites stratégies ne peuvent se substituer aux grands événements.
Je m’inquiète aussi de cette théorie de la dernière chance véhiculée parmi les souverainistes. Maintenant ou jamais, indique un livre du sociologue Jacques Beauchemin. Attention de ne pas confondre la dernière chance pour une génération de réaliser son rêve avec l’avenir du peuple québécois.