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vendredi, avril 10, 2015

OPÉRATION DILIGENCE La mémoire fuyante de l’entrepreneur Paul Sauvé complique le procès

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10 avril 2015 |Brian Myles | Justice
Le témoin principal de la poursuite, Paul Sauvé, a oublié certains événements survenus en 2006.
Photo: Sean Kilpatrick
La Presse canadienne
Le témoin principal de la poursuite, Paul Sauvé, a oublié certains événements survenus en 2006.
L’entrepreneur Paul Sauvé donne du fil à retordre à la Couronne dans le procès des six accusés de l’opération Diligence.
 
Le témoin principal de la poursuite a une mémoire fuyante des incidents qui l’ont marqué en 2006. Un membre des Hells Angels, Normand Ouimet, a procédé à une prise de contrôle hostile de son entreprise, L. M. Sauvé, afin de blanchir les profits de ses activités illicites et prendre le contrôle de la maçonnerie à Montréal. Ouimet aurait été assisté de l’homme d’affaires Louis-Pierre Lafortune, l’un des coaccusés.
 
Le tandem aurait graduellement pris le contrôle de la comptabilité, des chantiers de L. M. Sauvé, de la liste de ses sous-traitants, des embauches et des mises à pied. M. Sauvé, qui est bipolaire, n’était pas au sommet de sa forme à l’époque. « J’étais pas dans le meilleur des esprits à ce moment-là. J’acceptais les changements peut-être à tort », a-t-il dit jeudi, lors du procès devant jury de Lafortune et ses complices allégués (Robert Amato, Jocelyne Therrien, Guy Drouin, Daniel Lafond et Jerry Purdy).
 
Le témoin a mis sur son état d’esprit et le passage du temps ses difficultés à se remémorer de paroles précises lancées par Ouimet, ou encore de l’implication de Lafortune dans le renvoi de son comptable, Pierre Marchand, qui a été remplacé par l’une des coaccusés, Jocelyne Therrien.
 
Par contre, l’entrepreneur garde un souvenir indélébile du moment où Normand Ouimet lui a montré sa veste de cuir à l’effigie des Hells Angels, qu’il traînait dans le coffre d’une Mercedes prêtée par la compagnie. Ouimet lui a dit : « Au cas où il y en aurait qui avaient des doutes. »
 
Paul Sauvé a rencontré Louis-Pierre Lafortune par l’entremise des représentants du Fonds de solidarité de la FTQ (FSTQ). En 2003 et 2004, son entreprise était en difficulté financière et il cherchait à obtenir l’appui de la Banque Nationale et du Fonds. Il a réalisé qu’il ne faisait« pas partie de la bonne gang ». Ses employés étaient affiliés à l’International, un syndicat rival de la FTQ. « Il faut faire partie de la gang. Il faut avoir des contacts au sein de l’exécutif de la FTQ-Construction », a-t-il expliqué.
 
De fil en aiguille, Sauvé s’est rapproché de Jocelyn Dupuis, le directeur général de la FTQ-C à l’époque. Selon Paul Sauvé, Jocelyn Dupuis exerçait une influence démesurée sur l’industrie de la construction. Il était en contact étroit avec Louis-Pierre Lafortune et Normand Ouimet.
 
Quand Sauvé s’est plaint à Dupuis que les inspecteurs de la Commission de la construction du Québec (CCQ) l’importunaient sur les chantiers, le leader syndical a passé un coup de fil au responsable des inspections de l’organisme. Du jour au lendemain, la CCQ s’est montrée plus conciliante avec L. M. Sauvé. « La CCQ est gouvernée par la FTQ-C », a dit le témoin.
 
Paul Sauvé a été très vexé d’une conversation entre Jocelyn Dupuis et Louis-Pierre Lafortune, qu’il avait recruté dans son giron. Lafortune aurait dit de L. M. Sauvé : « C’est une poule aux oeufs d’or. Mais il faut se débarrasser du coq. »
 
« J’ai été tassé », a déploré Sauvé.